Eckhart TOLLE, METTRE EN PRATIQUE LE POUVOIR DU MOMENT PRÉSENT (8/9)
AVERTISSEMENT : la lecture de ce type d'ouvrage, peut-être mal traduit, peut-être mal assimilé, ne peut remplacer l'enseignement d'un maître authentique : une pratique de la méditation mal comprise peut, dans certains cas, s'avérer préjudiciable.
SUITE DU CHAPITRE 7
TROISIÈME PARTIE
ACCEPTATION ET LÂCHER PRISE
Lorsque vous lâchez prise face à ce qui est
et que vous devenez donc totalement présent,
le passé perd tout pouvoir.
Le royaume de l'Être,
qui était masqué par le mental se révèle.
Tout d'un coup, un grand calme naît en vous,
une insondable sensation de paix.
et au cœur de cette paix, il y a l'amour.
Et au cœur de tout cela,
il y a le sacré, l'incommensurable.
Ce à quoi on ne peut attribuer de nom.
CHAPITRE HUIT
ACCEPTATION DE L'INSTANT PRÉSENT
Les choses de la vie et l'impermanence des choses
Il y a les cycles de succès au cours desquels tout semble vous sourire et bien aller, et les cycles de l'échec quant tout ce que vous avez entrepris s'étiole et se désintègre et que vous devez vous laisser aller afin de faire place à la nouveauté ou à la transformation.
Si vous vous accrochez et résistez à ce moment là, cela veut dire que vous refusez de suivre le courant de la vie et vous en souffrirez.
L'involution est nécessaire pour qu'une nouvelle croissance puisse se produire. L'une ne peut exister sans l'autre.
Le cycle de l'involution est absolument essentiel à la réalisation spirituelle. Vous devez avoir connu un grand échec sur un certain plan, une grande perte ou une profonde souffrance pour que la dimension spirituelle vous interpelle. Ou peut-être est-ce le succès lui même qui a perdu son sens, devenant ainsi un échec ?
Derrière tout succès, il y a l'échec, et derrière tout échec, le succès. Dans ce monde-ci, c'est-à-dire sur le plan de la forme, tout le monde "échoue" tôt ou tard bien entendu et tout accomplissement revient éventuellement au rien.
Aucune forme n'est permanente.
Dans un état de conscience réalisée, vous êtes toujours actif et prenez plaisir à créer de nouvelles formes et circonstances, mais vous n'êtes pas identifié à elles. Telle est la différence. Vous n'avez pas besoin d'elles pour trouver le sens de votre moi. Elles ne constituent pas votre vie, seulement vos conditions de vie.
Un cycle peut durer de quelques heures à plusieurs années. Et dans les cycles longs, des cycles courts s'intercalent. De nombreuses maladies proviennent de la résistance aux cycles où l'énergie est basse, cycles pourtant essentiels à la régénération. La compulsion à passer à l'action et la tendance à vouloir tirer le sens de votre valeur personnelle et de votre identité de facteurs comme l'accomplissement constituent une illusion inévitable aussi longtemps que vous restez identifié au mental.
Et c'est précisément cette identification qui rend l'acceptation des cycles bas difficiles. Sans parler de les laisser être. Par conséquent, et comme mesure d'autoprotection, l'intelligence innée de l'organisme prendra les choses en main et créera une maladie pour vous obliger à vous arrêter, afin que la régénération nécessaire à l'organisme puisse s'opérer.
Aussi longtemps que vous qualifiez mentalement une situation de bonne, qu'il s'agisse d'une relation, d'une possession, d'un rôle social, d'un lieu ou de votre corps physique, votre mental s'y attache et s'identifie à elle. Cette situation vous rend heureux, vous fait vous sentir bien face à vous-même et peut même devenir en partie ce que vous êtes ou pensez être.
Mais rien ne dure dans cette dimension où les mites et la rouille détruisent. Soit les choses se terminent, soit elles changent. Ou bien encore elles subissent une inversion de polarité : la situation qui était positive hier ou l'an passé est soudainement ou graduellement devenue négative. La même situation qui vous comblait alors de bonheur, vous rend maintenant malheureux. La prospérité d'aujourd'hui devient la course à la consommation vide de demain. Les heureuses célébrations nuptiales et de lune de miel cèdent la place aux tourments du divorce ou de la coexistence malheureuse.
Ou bien alors une situation donnée prend fin et c'est son absence qui vous rend triste. Quand une circonstance ou une situation à laquelle l'esprit s'est attaché et identifié se modifie ou prend fin, l'esprit ne peut pas l'accepter. Il voudra s'y accrocher et résistera au changement, comme si on lui arrachait un bras ou une jambe.
Ceci veut donc dire que le bonheur et le malheur ne font qu'un. Seule l'illusion du temps les sépare.
LECTURE MÉDITATIVE
Quand on n'offre aucune résistance à la vie, on se retrouve dans un état de grâce et de bien-être. Et cet état ne dépend plus des circonstances, bonnes ou mauvaises.
Cela peut sembler presque paradoxal. Pourtant, lorsque vous êtes intérieurement libéré de votre dépendance à la forme, les conditions générales de votre vie, c'est à dire les formes extérieures, tendent à s'améliorer grandement. Les choses, les gens, ou les circonstances dont vous pensiez avoir besoin pour être heureux vous arrivent sans que vous jouiez des coudes ou ayez à fournir d'efforts. Et aussi longtemps qu'ils sont là, vous êtes libre de les goûter et de les apprécier.
Tout cela prendra fin bien sûr, les cycles viendront et iront, mais la peur de perdre ne sera plus là puisque la dépendance aura disparu. Et la vie se met alors à couler facilement.
Le bonheur qui provient d'une source secondaire quelconque n'est jamais bien profond. Ce n'est qu'un pâle reflet de la joie de l'Être, de l'intense paix que vous trouverez quand vous ne résisterez plus. L'être vous transporte au delà des contraintes polarisées du mental et vous libère de votre dépendance aux formes. Même si tout venait à s'écrouler et à être réduit en miettes autour de vous, vous sentiriez toujours ce profond noyau de paix intérieure. Vous ne seriez peut-être pas heureux, mais en paix.
Comment utiliser la négativité et y renoncer
Toute résistance intérieure se vit comme de la négativité, sous une forme ou une autre. Toute négativité est résistance. Dans ce contexte, les deux termes sont presque synonymes.
La négativité va de l'irritation ou de l'impatience à la colère féroce, d'une humeur dépressive ou d'un sombre ressentiment au désespoir suicidaire. Parfois, la résistance déclenche le corps de souffrance et, dans ce cas-là, celui-ci peut générer une puissante négativité comme la colère, la dépression ou un profond chagrin, même si le catalyseur est infime.
L'ego croit qu'il peut manipuler la réalité par la négativité et obtenir ainsi ce qu'il veut. Il croit que par ce biais, il peut créer une situation avantageuse ou dissiper une situation désavantageuse.
Si "vous" - le mental - ne croyiez pas que le malheur fonctionne, pourquoi alors le créeriez-vous ? Bien entendu, la négativité ne fonctionne pas. Au lieu de créer une situation favorable, elle l'empêche au contraire de se manifester. Au lieu de dissiper une situation défavorable, elle la maintient. Sa seule fonction "utile" est de renforcer l'ego, et c'est pour cette raison que l'ego l'aime tant.
Une fois que vous vous êtes identifié à une forme quelconque de négativité, vous ne voulez pas vous en départir et, à un niveau inconscient profond, vous ne désirez aucun changement positif, puisque cela menacerait votre identité de personne déprimée, en colère ou traitée injustement. Par conséquent, vous ignorerez, nierez ou saboterez ce qui est positif dans votre vie. C'est là un phénomène très commun. Et aussi dément.
EXERCICE
Observez n'importe quelle plante ou n'importe quel animal et laissez-le* vous enseigner ce qu'est l'acceptation, l'ouverture totale au présent, l'Être. Laissez-le* vous enseigner l'intégrité, c'est à dire comment ne faire qu'un, être vous-même, être vrai. Comment vivre, mourir et ne pas faire de la vie et de la mort un problème.
* "laissez-lui vous enseigner" selon la traduction.
Les émotions négatives contiennent parfois un message, comme les maladies. Mais les changements que vous effectuerez, qu'ils soient reliés à votre travail, à vos relations ou à votre milieu de vie, ne sont en fin de compte "qu'esthétiques", à moins d'être le fruit d'une modification du niveau de conscience. Et ceci ne peut vouloir dire qu'une seule chose : devenir plus présent. Quand vous avez atteint un certain niveau de présence, la négativité n'est plus nécessaire pour savoir ce dont vous avez besoin dans votre vie.
Mais aussi longtemps qu'elle est là, servez-vous en. Utilisez-la comme une sorte de signal qui vous rappelle d'être plus présent.
LECTURE MÉDITATIVE
Chaque fois que vous remarquerez que la négativité se manifeste en vous, sous une forme ou une autre, ne la voyez pas comme un échec dans votre démarche mais plutôt comme un précieux signal qui vous dit : "Réveille-toi ! Sors la tête ! Sois présent !"
En fait, la moindre irritation est significative et doit être reconnue et approfondie. Sinon, il y aura une accumulation de réactions passées sous silence.
Il se peut que vous puissiez laisser tomber la négativité une fois que vous aurez réalisé que vous ne voulez pas de ce champ énergétique en vous et qu'il ne sert à rien. Dans ce cas, assurez-vous de mettre cette négativité définitivement de côté. Si vous n'y réussissez pas, acceptez simplement qu'elle soit là et centrez-vous sur la sensation.
EXERCICE
L'autre solution, si vous n'arrivez pas à éliminer une réaction négative, c'est de la faire disparaître en vous imaginant devenir "perméable" à la cause externe de la réaction.
Je vous recommande de vous y exercer tout d'abord avec de petites choses banales.
Disons, par exemple, que vous êtes tranquillement assis chez vous. Tout d'un coup, le son strident du système antivol d'une voiture vous parvient de l'autre côté de la rue. L'irritation monte en vous. Quelle est la raison d'être de cette irritation ? Il n'y en a absolument aucune. Pourquoi l'avez-vous créée ? Ce n'est pas vous qui l'avez créée, mais le mental. Cela s'est fait automatiquement, de façon tout à fait inconsciente.
Pourquoi le mental a-t-il engendré cette irritation ? Parce qu'il porte la croyance inconsciente que la résistance qu'il installe et que vous expérimentez sous la forme de négativité ou de tourment viendra d'une manière ou d'une autre dissiper la situation non désirée. Bien entendu, ceci est une illusion. La résistance que le mental crée, de l'irritation ou de la colère dans ce cas, est beaucoup plus dérangeante que la cause originale qu'il essaie de faire disparaître.
Utilisez ce genre de situation pour en faire une pratique spirituelle.
EXERCICE
Sentez que vous devenez transparent, pour ainsi dire,comme si vous étiez dénué de la solidité de la matière corporelle. Permettez ensuite au bruit, ou à tout ce qui cause une réaction négative, de passer à travers vous. Ce bruit ne heurte plus de mur "solide" en vous.
Comme je l'ai spécifié, entraînez-vous d'abord avec de petites choses. L'alarme de voiture, le chien qui aboie, les enfants qui hurlent, les bouchons de circulation. Au lieu de maintenir en vous un mur de résistance sur lequel viennent constamment et douloureusement se heurter les choses "qui ne devraient pas se produire", laissez passer tout cela à travers vous.
Quelqu'un vous a dit quelque chose de grossier ou destiné à vous blesser ? Laissez ses paroles passer à travers vous au lieu de vous mettre en mode négatif et inconscient. Agressivité, défense ou retenue, laissez aller tout cela. N'offrez aucune résistance à ce qui est proféré, comme s'il n'y avait plus personne à blesser. LE PARDON, C'EST ÇA. DE CETTE FAÇON VOUS, DEVENEZ INVULNÉRABLE.
Cela ne vous empêche pas de rappeler à la personne que son comportement est inacceptable, si c'est ce que vous choisissez de faire. Chose certaine, elle n'aura plus le pouvoir de contrôler votre état intérieur. Vous êtes alors sous votre pouvoir, pas sous le pouvoir de quelqu'un d'autre, et votre mental ne mène plus le bal. Qu'il s'agisse de l'alarme d'une voiture, d'une personne grossière, d'une inondation, d'un tremblement de terre ou de la perte de toutes vos possessions, le mécanisme de la résistance est toujours le même.
Vous êtes encore en train de chercher à l'extérieur et ne réussissez pas à vous extirper du mode "recherche". Peut-être le prochain atelier vous donnera la réponse, ou bien cette nouvelle technique !
LECTURE MÉDITATIVE
Ne cherchez pas la paix. Ne cherchez pas à trouver un quelconque autre état que celui dans lequel vous êtes dans l'instant présent. Sinon, vous instaurerez un conflit intérieur et une résistance inconsciente.
Pardonnez-vous de ne pas être en paix. Dès l'instant ou vous acceptez totalement l'absence de paix, celle-ci se métamorphose en paix. Tout ce que vous acceptez totalement vous amène à la paix. C'est le miracle du lâcher-prise.
Quand vous acceptez ce qui est, chaque quartier de viande, chaque moment est le meilleur qui soit. C'EST CELA L'ILLUMINATION.
La nature de la compassion
LECTURE MÉDITATIVE
Après avoir dépassé le système des oppositions créé par le mental, vous êtes semblable à un lac profond. Les circonstances extérieures et tout ce qui peut se passer dans votre vie sont comme la surface du lac. Parfois calme, parfois ventée et agitée, selon les cycles des saisons. En profondeur, cependant, l'eau du lac reste impassible. Vous êtes le lac tout entier et non seulement la surface. Vous demeurez en contact avec votre propre profondeur, qui est absolument paisible en tout temps.
Vous ne résistez pas au changement puisque vous ne vous accrochez pas à quelque situation que ce soit. Votre paix intérieure ne dépend d'aucune condition. Vous évoluez sur le plan de l'Être - immuable, intemporel, immortel - et vous ne dépendez plus du monde extérieur des formes en perpétuelle fluctuation pour vous sentir comblé ou heureux. Vous pouvez certes les apprécier, jouer avec elles, en créer de nouvelles et goûter la beauté de tout cela. Mais vous n'aurez pas besoin de vous attacher à quoi que ce soit.
Aussi longtemps que vous n'êtes pas conscient de l'Être, la réalité des autres humains vous échappe puisque vous n'avez pas encore trouvé la vôtre. Leur forme plaira ou déplaira à votre mental, non seulement sur le plan du corps mais aussi sur celui de l'esprit. Les véritables relations deviennent possibles seulement lorsqu'il y a conscience de l'Être.
En somme, quand vous existez à partir de l'Être, vous percevez le corps et l'esprit d'une autre personne comme un écran, pour ainsi dire, derrière lequel vous pouvez sentir sa véritable réalité, tout comme vous sentez la vôtre. Donc, quand vous êtes confronté à la souffrance ou au comportement inconscient d'une autre personne, vous restez présent et en contact avec l'Être, et êtes ainsi en mesure de voir au delà de la forme et d'apercevoir cette pure étincelle chez l'autre à travers l'Être.
A ce niveau, toute souffrance se conçoit comme une illusion. La souffrance est le fruit de l'identification à la forme. Des guérisons miraculeuses se produisent parfois chez les autres, s'ils sont prêts, lorsqu'un être réalisé vient éveiller leur conscience.
La compassion, c'est la conscience que vous avez un lien profond qui vous unit à toutes les créatures. La prochaine fois que vous affirmerez ne rien avoir en commun avec telle ou telle personne, rappelez-vous au contraire que vous avez au contraire beaucoup en commun avec elle : d'ici à quelques années - deux ans ou soixante-dix ans, peu importe -, vous serez tous les deux des cadavres en décomposition, puis simplement un amas de poussière et, à la fin, plus rien du tout. Cette prise de conscience vous fait humblement redescendre sur terre et ne laisse pas grand place à l'orgueil.
Est-ce pour autant une pensée négative ? Non, c'est un fait. Pourquoi fermer les yeux dessus ?
Dans ce sens-là, vous et toutes les autres créatures êtes sur un pied d'égalité totale.
EXERCICE
Un des plus puissants exercices spirituels consiste à méditer profondément sur la mortalité des formes matérielles, la vôtre y compris. Cela s'appelle "mourir avant de mourir".
Absorbez-vous profondément dans cette méditation. Votre forme matérielle se dissipe, n'existe plus. Puis arrive le moment où toutes les formes-pensées s'éteignent également. Pourtant, vous êtes encore là, en tant que cette divine présence, radieuse et totalement éveillée.
Ce qui a toujours été réel reste, et seuls les noms, les formes et les illusions meurent.
A ce niveau profond, la compassion devient une forme de guérison dans le sens le plus large. Dans un état de compassion, votre influence guérissante s'exerce surtout sur l'être, et non sur le faire. Chacune des personnes avec qui vous entrerez en contact sera touchée par votre présence et par la paix qui émanera de vous, que vous en soyez conscient ou pas.
Quand vous êtes totalement présent et que les gens autour de vous adoptent des comportements inconscients, vous ne sentez pas le besoin de réagir, ne leur accordant ainsi aucune substance. La paix en vous est si vaste et si profonde que tout ce qui n'est pas paix est absorbé par elle comme si rien d'autre n'avait jamais existé. Ceci met fin au cycle karmique de l'action et de la réaction.
Les animaux, les arbres, les fleurs sentiront eux aussi la paix qui est en vous et y seront sensibles. Votre enseignement se fait en étant, en vivant la paix de Dieu.
Vous devenez "la lumière du monde", une émanation de la conscience pure et faites aussi disparaître la souffrance sur le plan de la cause. Vous éliminez l'inconscience du monde.
La sagesse du lâcher-prise
C'est la qualité de conscience chez vous, à cet instant même, qui est le principal agent déterminant du genre de futur que vous connaîtrez. Lâcher prise est donc la chose la plus importante que vous puissiez faire pour amener un changement positif. Tout geste que vous posez par la suite n'est que secondaire. Aucune action véritablement positive ne peut provenir d'un état de conscience qui n'est pas fondé sur le lâcher-prise.
Pour certaines personnes, ce terme peut avoir des connotations négatives. Il peut vouloir dire défaite, renoncement, incapacité d'être à la hauteur des défis de la vie, léthargie, etc. Cependant, le véritable détachement est quelque chose d'entièrement différent. Cela ne signifie pas endurer passivement une situation dans laquelle vous vous trouvez sans tenter quoi que ce soit pour l'améliorer. Et cela ne signifie pas non plus que vous devez cesser d'établir des plans pour transformer votre vie ou de poser des gestes positifs.
LECTURE MÉDITATIVE
Le lâcher-prise est la simple mais profonde sagesse qui nous porte à laisser couler le courant de la vie plutôt que d'y résister. Et le seul moment où vous pouvez sentir ce courant, c'est dans l'instant présent. Par conséquent, lâcher prise, c'est accepter le moment présent inconditionnellement et sans réserve. C'est renoncer à la résistance intérieure qui s'oppose à ce qui est.
Résister intérieurement, c'est dire non à ce qui est, par le jugement de l'esprit et la négativité émotionnelle. Cette résistance s'accentue particulièrement quand les choses vont mal, montrant par là qu'il y a un décalage entre les exigences ou les attentes rigides du mental et ce qui est. Ce décalage est celui de la souffrance.
Si vous avez vécu suffisamment longtemps, vous saurez que les choses "vont mal" relativement souvent. Et c'est précisément dans ces moments-là qu'il vous faut mettre en pratique le lâcher-prise si vous voulez éliminer la souffrance et le chagrin de votre vie. Quand vous acceptez ce qui est, vous êtes instantanément libéré de l'identification au mental et vous reprenez par conséquent contact avec l'Être. La résistance, c'est le mental.
Le lâcher-prise est un phénomène purement intérieur; Cela ne veut pas dire que, sur le plan concret de la dimension extérieure, vous ne passiez pas à l'action pour changer telle ou telle situation.
En fait, quand vous lâchez prise, ce n'est pas la situation dans sa globalité que vous devez accepter, mais juste ce minuscule segment appelé instant présent.
Par exemple, si vous étiez pris dans la boue quelque part, vous ne diriez pas : "OK, je me résigne au fait d'être pris dans la boue". La résignation n'a rien à voir avec le lâcher-prise.
LECTURE MÉDITATIVE
Il n'est pas nécessaire que vous acceptiez une situation indésirable ou désagréable. Il n'est pas nécessaire non plus que vous vous racontiez des histoires en vous disant qu'il n'y a rien de mal à être pris dans la boue. Au contraire, vous reconnaissez alors totalement que vous voulez en sortir. Puis, vous ramenez votre attention sur le moment présent sans mentalement l'étiqueter d'une façon ou d'une autre.
En somme, vous ne portez aucun jugement sur le présent. Par conséquent, il n'y a ni opposition ni négativité émotionnelle. Vous acceptez le moment tel qu'il est. Puis vous passez à l'action et faites tout ce qui est en votre pouvoir pour vous en sortir.
Voici ce que j'appelle une action positive. C'est de loin beaucoup plus efficace qu'une action négative, qui est le fruit de la colère, du désespoir ou de la frustration. Continuez à mettre en pratique le lâcher-prise en vous retenant d'étiqueter le présent, et ce, jusqu'à l'obtention du résultat voulu.
Laissez-moi vous donner une analogie visuelle afin d'illustrer ce que je tente de vous expliquer. Vous marchez le long d'un sentier la nuit, entouré d'un épais brouillard. Toutefois, vous disposez d'une puissante torche électrique qui fend ce brouillard et trace devant vous un passage étroit mais dégagé. Disons que ce brouillard représente vos conditions de vie du passé et du futur et que la torche électrique symbolise la présence consciente, le passage dégagé, le présent.
Le fait de ne pas lâcher prise endurcit la forme psychologique, la carapace de l'ego, et crée un fort sens de dissociation. Vous percevez le monde autour de vous et les gens en particulier comme une menace. Ceci s'accompagne de la compulsion inconsciente de détruire les autres par le jugement, ainsi que du besoin de rivaliser et de dominer. Même la nature devient votre ennemi et c'est la peur qui gouverne vos perceptions et vos interprétations. La maladie mentale que l'on appelle la paranoïa n'est qu'une forme légèrement plus aigüe de cet état normal, mais dysfonctionnel, de conscience.
Ce n'est pas seulement votre forme psychologique qui s'endurcit, mais également votre corps physique, qui devient dur et rigide en raison de la résistance. De la tension se crée dans diverses parties du corps, et celui-ci tout entier se contracte. La libre circulation de l'énergie dans le corps, essentielle à un fonctionnement sain, est grandement restreinte.
Le massage et certaines formes de physiothérapie peuvent certes aider ç restituer cette circulation. Mais, à moins que vous ne fassiez du lâcher-prise une pratique quotidienne, ces choses ne peuvent vous procurer qu'un soulagement temporaire des symptômes, puisque la cause, c'est à dire le comportement de résistance, n'a pas été résolue.
En vous existe quelque chose qui n'est pas affecté par les circonstances changeantes de votre vie et vous ne pouvez y avoir accès que par le lâcher-prise. Ce quelque chose, c'est votre Être même, qui se trouve éternellement dans le royaume intemporel du présent.
LECTURE MÉDITATIVE
Si vous estimez que les circonstances de votre vie sont insatisfaisantes, ou même intolérables, ce n'est que tout d'abord en lâchant prise que vous pouvez rompre le comportement inconscient de résistance qui perpétue justement ces circonstances.
Le lâcher-prise est parfaitement compatible avec le passage à l'action, l'instauration de changements ou l'atteint d'objectifs. Mais dans l'état de lâcher-prise, le "faire "est mû par une qualité autre, une énergie totalement différente qui vous remet en contact avec l'énergie première de l'Être. Et si ce que vous faites en est imprégné, cela devient une célébration joyeuse de l'énergie vitale qui vous ramène encore plus profondément dans le présent.
Quand il y a absence de résistance, la qualité de la conscience chez vous et, par conséquent, la qualité de tout ce que vous entreprenez ou créez est grandement augmentée. Les résultats viendront d'eux-mêmes et reflèteront cette qualité. On pourrait appeler cela "l'action par le lâcher-prise".
LECTURE MÉDITATIVE
Quand vous êtes dans un état de lâcher-prise, vous voyez clairement ce qui doit être fait et vous passez à l'action. Vous vous concentrez sur une seule chose à la fois pour ensuite bien l'accomplir. Tirez des leçons de la nature : observez de quelle manière tout s'accomplit et comment le miracle de la vie se déroule sans insatisfaction ni tourment.
C'est pour cela que Jésus a dit : "Regardez comment les lys poussent : ils ne s'affolent ni ne se peinent."
EXERCICE
Si votre situation globale est insatisfaisante ou déplaisante, reconnaissez d'abord l'instant présent et lâchez prise face à ce qui est. C'est la torche électrique qui fend le brouillard. Votre état de conscience cesse alors d'être contrôlé par les circonstances extérieures. Vous n'êtes plus mû par la réaction et la résistance. Ensuite, envisagez la situation en détail et demandez-vous : "Est-ce que je peux faire quelque chose pour changer la situation ou l'améliorer, ou pour m'en dégager ?"
Dans l'affirmative, posez le geste approprié.
Ne concentrez pas votre attention sur les mille et une choses que vous pouvez faire maintenant. Ceci ne veut pas dire que vous ne devriez pas planifier. C'est peut-être LA chose à faire. Assurez-vous cependant de ne pas commencer à vous "passer mentalement des films", à vous projeter dans le futur : cela vous ferait perdre le contact avec le présent. Peu importe le geste que vous posez, il ne portera peut-être pas fruit immédiatement. Ne résistez pas à ce qui est jusqu'à ce que cela se produise.
LECTURE MÉDITATIVE
Si vous ne pouvez poser aucun geste ni vous soustraire à la situation, utilisez celle-ci pour lâcher prise encore plus profondément, pour être encore plus intensément dans le présent, dans l'Être.
Quand vous pénétrez dans la dimension intemporelle du présent, le changement arrive souvent d'étrange façon, sans que vous ayez besoin de faire vous-même grand chose. La vie elle-même se met de la partie. Si des facteurs intérieurs comme la peur, la culpabilité ou l'inertie vous empêchaient jusque là de passer à l'action, ils se dissiperont à la lumière de votre présence consciente.
Ne confondez pas le lâcher-prise avec l'attitude je-m'en-foutiste du genre "ça m'est égal". Si vous y regardez de plus près, vous découvrirez qu'une telle attitude est teintée d'une négativité ayant la forme du ressentiment caché. Ce n'est donc pas du lâcher-prise mais bel et bien une résistance déguisée.
Au moment où vous lâchez prise, tournez votre attention vers l'intérieur pour vérifier s'il reste de la résistance en vous. Soyez très vigilant à ce moment là, sinon un restant de résistance pourrait encore se cacher dans quelque coin sombre sous la forme d'une pensée ou d'une émotion non conscientisée.
De l'énergie mentale à l'énergie spirituelle
EXERCICE
Commencez par reconnaître qu'il y a résistance. Soyez présent lorsque cela arrive. Observez la façon dont votre mental la crée, comment il étiquette la situation, vous même ou les autres. Attardez-vous au mental qui entre en jeu. Sentez l'énergie de l'émotion.
En vous faisant le témoin de cette résistance, vous verrez qu'elle ne sert à rien. En concentrant toute votre attention sur le présent, la résistance inconsciente est conscientisée et c'en est fait d'elle.
Il vous est impossible d'être conscient et malheureux, conscient et dans la négativité. Peu importe leur forme, la négativité, le tourment et la souffrance veulent dire résistance, et la résistance est toujours inconsciente.
Choisiriez-vous vraiment le tourment ? Si vous ne le choisissez pas, alors comment se produit-il ? Quelle est sa raison d'être ? Qui le maintient en vie ?
Vous dites être conscient de vos émotions tourmentées, mais la vérité, c'est que vous êtes identifié à elles et que vous entretenez ce processus par la pensée compulsive. Et tout cela est inconscient. Si vous étiez conscient, c'est à dire totalement présent à l'instant, toute négativité disparaîtrait presque instantanément. Celle-ci ne pourrait pas survivre en votre présence. Elle ne peut y arriver qu'en votre absence;
Même le corps de souffrance ne peut survivre longtemps en votre présence. Vous maintenez donc votre tourment en vie par le temps. C'est son oxygène. Remplacez le facteur temps par la conscience intense du moment présent, et le temps meurt. Mais voulez-vous vraiment qu'il meure ? En avez-vous vraiment assez ? Qui voudrait s'en passer ?
A moins de mettre en pratique le lâcher-prise, la dimension spirituelle est quelque chose qu'on lit dans les manuels, dont on parle, qui nous enthousiasme, sur lequel on écrit des livres, on réfléchit, auquel on croit ou non, selon le cas. Cela ne fait pas aucune différence.
LECTURE MÉDITATIVE
Du moins pas avant que le lâcher-prise devienne une réalité concrète dans votre vie. Quand c'est le cas, l'énergie qui émane de vous et mène votre vie a une fréquence vibratoire beaucoup plus élevée que l'énergie mentale qui contrôle encore le monde, c'est à dire l'énergie à l'origine des structures sociales, politiques et économiques de notre civilisation. Cette énergie mentale est aussi celle qui se perpétue en permanence par l'intermédiaire des médias et de l'éducation. C'est ainsi que l'énergie spirituelle advient dans ce monde.
Cette énergie n'occasionne aucune souffrance pour vous, les autres humains, ou n'importe quelle autre forme de vie planétaire.
Le lâcher-prise dans les relations interpersonnelles
Il est vrai que seule une personne inconsciente essaiera d'utiliser ou de manipuler les autres. Mais il est également vrai que seule une personne inconsciente peut être utilisée ou manipulée. Si vous offrez de la résistance au comportement inconscient des autres ou luttez contre cela, vous tombez vous-même dans l'inconscience.
Mais lâcher prise ne veut pas dire se laisser exploiter par les gens inconscients. Pas du tout. Il est parfaitement possible de dire "non" fermement et clairement à quelqu'un ou de se dissocier d'une situation tout en restant en même temps dans un état intérieur d'absence totale de résistance.
EXERCICE
Lorsque vous dites "non" à quelqu'un ou à une situation, faites en sorte que votre choix origine non pas d'une réaction, mais d'une prise de conscience, d'un discernement clair de ce qui est juste ou pas pour vous dans le moment.
Qu'il soit un "non" de grande qualité, libre de toute négativité, qui ne créera donc pas de souffrance ultérieure.
Si vous ne réussissez pas à lâcher prise, passez immédiatement à l'action : dites le fond de votre pensée aux personnes concernées, faites quelque chose qui modifiera la situation ou bien encore, dissociez-vous totalement de la situation. Assumez la responsabilité de votre vie.
Ne polluez pas votre beau et radieux Être intérieur ni la Terre avec de la négativité. Ne laissez pas le tourment s'immiscer en vous sous quelque forme que ce soit.
EXERCICE
Si vous ne pouvez pas passer à l'action, parce que vous êtes en prison par exemple, alors, il vous reste deux choix : résister ou lâcher prise. L'esclavage ou la libération intérieure devant les conditions externes. La souffrance ou la paix intérieure.
Le lâcher-prise viendra profondément modifier vos relations. Si vous ne réussissez jamais à accepter ce qui est, ceci sous-entend que vous ne pourrez jamais accepter les autres tels qu'ils sont. Vous jugerez, critiquerez, étiquetterez, rejetterez les gens ou essaierez de les changer.
Par ailleurs, si vous faites continuellement de moment présent un moyen pour arriver à une fin dans le futur, vous ferez de même avec tous les gens que vous rencontrerez ou avec qui vous serez en rapport. La relation - l'être humain - revêt une importance secondaire pour vous ou pas d'importance du tout. Ce que vous retirerez de la relation est de nature primaire, c'est à dire un gain matériel, un sentiment de pouvoir, du plaisir physique ou une forme quelconque de gratification de l'ego.
Laissez-moi vous expliquer de quelle façon le lâcher-prise peut fonctionner dans les relations. :
EXERCICE
Quand vous commencez à vous disputer ou à entrer en conflit avec votre partenaire ou un proche, observez d'abord à quel point vous vous tenez sur la défensive lorsque l'autre attaque votre position ou sentez la force de votre propre agressivité lorsque vous attaquez la position de l'autre personne. Remarquez votre attachement à vos points de vue et à vos opinions.
Percevez bien l'énergie mentale et émotionnelle derrière votre besoin d'avoir raison et de donner tort à l'autre. C'est l'énergie de l'ego. Vous la conscientiserez en la reconnaissant, en la sentant le plus totalement possible. Puis, un jour, vous réaliserez soudainement au beau milieu d'une dispute que vous avez le choix et déciderez peut-être tout simplement de ne pas réagir, juste pour voir ce qui se passe.
AINSI, VOUS LÂCHEZ PRISE.
Je ne veux pas dire que vous devez mettre de côté la réaction en disant juste : "Bon, tu as raison" avec une expression qui sous-entend : "Moi, je suis au-dessus de ces enfantillages inconscients". Ceci ne fait que transporter la résistance sur un autre plan : celui du mental, toujours actif, qui prétend être supérieur. Je parle ici de laisser tomber tout le champ énergétique mental et émotionnel qui luttait en vous pour avoir le pouvoir.
L'ego est rusé. Il vous faut donc être très vigilant, très présent et totalement honnête avec vous-même pour voir si vous avez véritablement renoncé à l'identification à une position.
LECTURE MÉDITATIVE
Si vous vous sentez soudainement très léger, dégagé et profondément en paix, c'est le signe indiscutable que vous avez vraiment lâché prise.
Regardez alors de près ce qui se passe chez l'autre personne, quant à la position qu'elle défendait, lorsque vous ne donnez plus d'énergie cette dernière en lui résistant. Quand l'identification aux prises de position est terminée, une véritable communication s'instaure.
La non-résistance n'est pas nécessairement synonyme d'inaction. Tout ce que cela veut dire, c'est que toute action n'est plus forcément une réaction. Souvenez-vous de la profonde sagesse qui sous-tend la pratique des arts martiaux : ne pas offrir de résistance à l'adversaire.
Céder pour mieux triompher de lui.
Cela étant dit, "ne rien faire" quand vous êtes dans un état de présence intense est un puissant outil de transformation et de guérison, qu'il s'agisse de situations ou de personnes. Dans le taoïsme, il existe un terme chinois, wuwei, que l'on traduit habituellement par "activité sans action" ou par "être tranquillement assis sans rien faire". Dans la chine d'autrefois, ceci était considéré comme un des plus importants accomplissements ou une des plus grandes vertus.
C'est radicalement différent de l'inactivité dans l'état de conscience ordinaire, ou si vous préférez de l'inconscience, qui résulte de la peur, de l'inertie ou de l'indécision. Le véritable "non-faire" sous-entend l'absence de résistance intérieure et un état de vigilance intense.
D'un autre côté, si l'action est nécessaire, vous ne réagirez plus en fonction de votre conditionnement mental, mais agirez selon votre présence consciente. Dans cet état de présence, votre mental est libre de tout concept, y compris celui de la non-violence. Alors, qui peut prévoir ce que vous ferez ?
L'ego croit que votre force se trouve dans la résistance, alors qu'en vérité la résistance vous coupe de l'Être, le seul véritable pouvoir. La résistance, c'est de la faiblesse et de la peur qui se font passer pour de la force. Ce que l'ego voit comme de la faiblesse dans votre Être, ce sont sa pureté, son innocence et sa force. Et ce qu'il juge comme de la force est en fait une faiblesse. L'ego existe donc sur un perpétuel mode de résistance et loue de faux rôles pour masquer votre prétendue "faiblesse", qui est en vérité votre force.
Jusqu'à ce qu'il y ait lâcher-prise, les jeux de rôle inconscients constituent en grande partie l'interaction entre humains. Avec le lâcher-prise, vous n'avez plus besoin des défenses de l'ego et de faux masques. Vous devenez très simple, très vrai : "C'est dangereux, dit l'ego. Tu vas te faire blesser. Tu seras vulnérable."
Mais ce que l'ego ne sait pas, bien entendu, c'est que c'est seulement en renonçant à la résistance, en devenant vulnérable, que vous pouvez découvrir votre véritable et essentielle invulnérabilité.
FIN DU CHAPITRE HUIT