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La Chanson Grise

11 janvier 2020

Haïku

 

 

La flaque sous la pluie

grandira bien assez

pour y loger la lune

 

 

JCP 01/2020

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10 janvier 2020

Hésiode, La Théogonie

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 Buste possible

 

Hésiode

Poète grec, 8ième siècle Av. J-C - début du 7ième siècle av. J-C

La Théogonie

Traduction : Leconte de Lisle

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CLIC / LIEN CI-DESSOUS

http://chansongrise.canalblog.com/archives/2010/01/01/38752067.html

 OU :

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6 janvier 2020

Langueurs hivernales (1087)

IMG_3309 co169pie copie                                                                                                                                      Toulouse, place du Capitole : Au Florida (im. JCP)

 

Langueurs hivernales                                                                                                                                                         

                                                                                                                                                                À Paul Verlaine

                                                                                                                                                                À Louis Aragon

 

À la terrasse du café,

libérant pour un temps

mes yeux lourds de mon livre,

d’autres yeux leur sourirent.

 

Insouciante jeune femme

qui ne sut la valeur de l’offrande,

rayon pris au soleil

qui réchauffe encore mon cœur

au souvenir des jours heureux.

 

Aux hivers les plus froids

veille toujours la flamme

des violons de l’été.

 

 

 

JCP 11/2019 – 01/2020 Au Père Léon, brasserie toulousaine

3 janvier 2020

Bibliothèque, nouvelles de Lovecraft

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Howard Pillips Lovecraft

 (USA, 1890-1937)

 

Air froid

 

Dans l'abîme du temps

 

Ces textes sont libres de droits

29 décembre 2019

Trois citations plus une : Alexandre Jollien + ... et ...avec...

 

 

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Trois citations plus une qui, provenant chacune de régions du globe fort éloignées, n'en sont pas pour autant lointaines par leur esprit. 

 

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1 - "C’est une sacrée liberté que de vivre comme si on avait tout le temps du monde, et bannir aussi bien la hâte que la paresse".

Alexandre Jollien, extrait de « Trois amis en quête de sagesse » écrit en coopération avec Matthieu Ricard et Christophe André (2017).

 

2 - "Pour aller plus vite, ralentissez". Maître zen anonyme.

Également cité dans le même ouvrage par le même auteur.

 

3 - "Qui se presse perd son temps" (Quien se apura pierde su tiempo). Proverbe patagon.

 

4 - Ajoutons l'historiette du disciple demandant à son maître zen :

- Combien de temps me faudra-t-il pour atteindre le satori (l'éveil) ?

- 30 Ans.

- C'est que je suis pressé...

- Dans ce cas, 50 ans.

 

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Il convenait peut-être de réunir ces citations, rare et rassurante approche d'une même sagesse sans frontières.

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24 décembre 2019

Le Dictionnaire éventuel : 93 fautif

 

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Fautif : Certains sont très bien imités ; syn. : perruque      

 

        

24 décembre 2019

Toulouse : la tournée des bistrots

 

ou : Chez les marchands de bien-être

(La consommation abusive de boissons alcoolisées nuit à la santé.)

Mises à jour : 20/12/19, 21/12/19, 22/12/2019

 

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INTRODUCTION

 

                         À l’image de toute métropole ou chef-lieu de département, Toulouse a ses bars, ses cafés, ses brasseries, ses restaurants, ses buvettes et ses guinguettes en bord de fleuve ou sur le fleuve, établissements saisonniers pour les derniers ; ainsi que quelques péniches-restaurant.

Beaucoup se limitent à la fonction simple, celle d’offrir café, rafraîchissement et prise de nourriture selon un horaire établi, placés ou non près de lieux passagers (théâtres, cinémas, boutiques, lieux de promenade prisés, musées, universités, grandes écoles, rues commerçantes, parcs et jardins…). Ces établissements-là ne sont pas à proprement parler « marchands de bien-être », mais simplement de boisson et de nourriture prises le plus souvent sans s’attarder (avant de reprendre le travail) : la fonction utilitaire prédomine.

D’autres établissements, fréquentés par une clientèle appartenant à la société toulousaine et environnante, sont pour leur part devenus au fil du temps des lieux de vie passagers, de rencontre et de bien-être d’étudiants, de commerciaux devant leur ordinateur portable, d’artistes, d’écrivains, de jeunes de classes diverses joyeusement mêlés, de supporters en « avant ou après- match », de personnes âgées simplement heureuses d’être là, d’ouvriers sur chantiers voisins, d’employées et d’employés d’établissements proches ou de passage, de buveurs bruyants, voire de respectables trafiquants.

On s’assoit là pour passer un bon moment, on dispose d’un temps que l’on compte bien utiliser à satiété, sans retenue, seul ou entre amis. C’est plutôt à ce dernier esprit, impalpable substance recherchée de tout épicurienne ou épicurien, qu’ont tenu à s’attacher ces lignes : le rien-faire des journées de liberté, où, lassée de lisser le pavé des rues, la semelle, poussiéreuse ou gorgée de pluie exige, autoritaire, l’abri du guéridon.

Ayant fréquenté nombre de ces lieux de bien-être où parfois la convivialité s’invite, l’auteur de ce texte en dresse un panorama conforme à ses préférences personnelles, susceptibles cependant d’offrir un premier aperçu à quiconque. Ceci compte tenu qu’il ne peut s’agir là que d’un instantané de ces établissements, dont configuration et prestations peuvent varier au gré des changements de propriétaire, comme au déplacement de la clientèle vers d’autres lieux - pour des raisons parfois obscures.

C’est ainsi qu’autrefois le centre nerveux de Toulouse s’étendait, depuis les allées Roosevelt (alors nommées Lafayette), vers la place Wilson (nommée de même Lafayette) d’un côté, et vers les deux boulevards, Strasbourg et Carnot, qui prennent naissance en ce lieu précis de l’autre côté. Les grands cafés et brasseries qui y triomphaient alors face à face se nommaient « L’Albrighi » (aujourd’hui « Quick »), et « Les Américains », toujours en place sous le même nom. Ce dernier était considéré comme le plus grand café d’Europe au début du 20ième siècle ! La « FNAC » en a laissé ce qu’il en reste aujourd’hui. Et la fréquentation du lieu, de crinoline, canne et chapeau melon, a plutôt évolué ici vers le populaire et le cosmopolite.

 

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Quant à la place du Capitole, aujourd’hui centre affectif de la ville où « tout » se passe et où il « faut être » pour ne rien perdre de la vie toulousaine, elle n’était alors que croisement de rails, parcage de tramways, d’omnibus, de charrettes, de voitures à chevaux ou à bras de toute sorte, et lieu de foire. Un, ou deux cafés n’y tenaient que quelques tables pour forains et voyageurs, et le lieu fut sans doute un des plus nauséabonds de la ville par la concentration de chevaux qui, passant ou stationnant, y déposaient leurs libéralités. Sous nos préceptes maladifs de propreté, d’hygiène et de sécurité (qui n’ont pour autant pas aboli la guerre), on imagine assez mal cela aujourd’hui.

 

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Par ailleurs, on assiste depuis quelques années déjà à une croissance notable de la clientèle café-brasserie à Toulouse, comme à une fréquentation piétonne grandissante de ses rues. Et la zone piétonne du centre-ville se voit à cet effet agrandie d’année en année. Le spectacle du petit café « quatre-guéridons-huit-chaises-toutes-occupées » sur le trottoir, façade de trois mètres de large brillamment rénovée, nappes à carreaux en pleine rue et senteurs épicées, a de quoi réjouir le flâneur, s’il ne le happe pas au passage. La croissance notable de la ville et de sa périphérie en est certes en bonne part la cause, mais certains croient y voir des relents d’« années folles » en « ces temps d’approche de crise »… bien que parfois débattue en terrasse, la politique est ici hors sujet. Mais, offert à une ville déjà très vivante, ce supplément de fréquentation n’est pas pour déplaire, tant au promeneur qu’au cafetier et au restaurateur.

Ainsi, lisant ces lignes et au terme de quelques tâtonnements (la consommation abusive de boissons alcoolisées nuit à la santé comme il est dit), flâneurs, oisifs comme employés pressés - pour ne citer qu’eux* ! - trouveront le ou les lieux conformes à leurs attentes, et s’y fidéliseront ou non, selon le caractère de la fréquentation, les boissons et les plats proposés, au fil des saisons comme des envies.

Des habitudes des consommatrices* et des consommateurs : depuis quelques années déjà, on peut noter aux terrasses, été comme hiver, le retour surprenant d’une boisson alcoolisée, autrefois honteusement cachée bas derrière tout bar et réservée en journée à l’ivrogne de quartier : le blanc sec. Celui-ci, désormais du dernier chic, est servi en verre dégustation à haut pied lui conférant le prestige perdu hors repas (le rosé n’est pas en reste, et parfois même le rouge). Ceci aussi bien pour le buveur adulte confirmé que l’adolescente jaillie du lycée voisin. De tonitruantes campagnes contre l’alcool n’en sont pas venues à bout : cela rassure un peu sur l’esprit de résistance, que l’on croyait perdu dans notre pays - mais questionne aussi.

Certes, le vigneron ne se plaint pas de la demande nouvelle, heureux de supplanter, satisfaisant ce geste inconsciemment patriotique, le géant Coca-Cola sur un territoire trop longtemps acquis, même si la consommation abusive de boissons alcoolisées demeure et demeurera toujours dommageable à la santé.

* Au-delà de l’écriture dite inclusive exigée des néo-féministes, la domination féminine est aujourd’hui écrasante dans de nombreux cafés toulousains. Nul ne saurait s’en plaindre, et on peut voir là un heureux rehaussement de respectabilité auquel aspiraient tant d’établissements dits « mal fréquentés » par une clientèle quasi-exclusivement masculine, oubliant parfois son savoir-vivre et par trop buveuse. Ceci étant, l’alcoolisme n’est pas seulement l’apanage du « mâle » en question.

 

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                             Souffrant d’un incurable mal le poussant à ces assemblages de mots, peu prisés de nos jours et nommés poésie, l’auteur s’obstine encore à quelques-uns de ces textes brefs, inspirés par ces lieux et ce qu’il y vit - ou crut y voir à travers son pauvre talent.

Écrits à l’adresse des poétophobes en écriture bleutée, ces mots pourront ainsi, aisément repérables, être évités avec un mépris salutaire.

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Au café

 

Guéridon bien placé,

                          de quoi écrire

 et des livres fermés.

 

- Garçon, un seau de virgules,

                       quelques points de suspension

et une grande carafe d’Instant-présent*.

 

 

JCP 12/2019

*À l’eau gazeuse ou bien sur glace,

l’Instant-présent se savoure

accompagné d’un bon rien-faire attentionné.

 

 

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L’ordre est alphabétique. L’appréciation - subjective - va de 1 à 5 verres

Le nombre des visites commentées a été réduit à huit des adresses les plus fréquentées et les plus significatives de la ville.

 

 

 

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1 – L’Alimentation, place de la Bourse (métro Esquirol)

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                   Image :X              

                        Restaurant, café et bar à vins au style original, plus, à deux pas sur la place, une véritable « épicerie » orientée vins. Ouvert depuis 2015.

Accueil : 8/10

Accueil agréable, service sympathique.

Bien-être extérieur : 7/10

Guéridons classiques, fauteuils métal sur sol un peu inégal (racines d’arbres affleurant). Ombragée, la place est calme et agréable. Passage automobile : bien qu’assez proche, modeste, respectueux et peu gênant. Terrasse couverte et cernée de toile en hiver, avec chauffage au gaz.

Passage piétonnier : continu mais discret. Bonne impression de calme chaleureux, on s’y sent bien.

Bien-être intérieur : 8/10.

Belle salle, cadre agréable et très original : une cuisine dans la salle même. Un pan de mur occupé par des casiers à bouteilles. Hautes tables et tabourets hauts en bonne part.

Clientèle : variée, plutôt jeune et féminine en journée. Diverse à l’heure des repas. Généralement paisible.

Prestations : café toute la journée, restaurant (menu, carte, plats du jour…), soirées dégustation.

Voir et savoir :

https://www.lalimentation.fr/

 

 

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2 - Le Black Lion, allées Paul Feuga (métro et tram « Palais de justice »)

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Image : X

 

Comme son nom le suggère, il s’agit d’un pub de tradition anglaise.

Accueil : non noté.

Pas d’accueil au sens du terme : les boissons ne sont pas servies à table, le client se rend au bar, commande, paie sur le champ et se retire boisson en main vers la table de son choix. Du fait, le pourboire ne semble pas être d’usage. Les personnes (jeunes) affectées aux tireuses de bière sont tout à fait agréables.

Seuls les repas sont servis à table.

Bien-être extérieur : 9/10

Dans l’absence probable d’autorisation à construire en dur, vaste terrasse de type « barnum » à parasols jointifs (chauffants en hiver) et cloisons de toile noire (black) partiellement transparente excluant les courants d’air excessifs. Guéridons et chaises classiques, quelques tables et chaises hautes seulement. La terrasse est divisée en deux parties distinctes par une allée bordée de toile.

Bien-être intérieur : 9/10 côté droit, 8/10 côté gauche

L’intérieur est également divisé en deux parties par, curieusement, l’entrée d’un cabinet d’avocats incluse dans sa superficie. Il y a un bar de chaque côté, le bar côté gauche, plus long (15 tireuses à bière), étant généralement le seul en fonction dans la journée, et le plus fréquenté.

Côté droit : banquettes confortables avec séparations. Ambiance « cosy » agréable.

Côté gauche : guéridons et chaises (quelques tables et tabourets hauts assez peu confortables). Bois sombre, lumière douce.

Aspect général et décoration très attrayante dans un authentique style pub anglais (étagères emplies de vieux objets, livres et bibelots…). Un écran rediffuse en silence et en boucle des évènements sportifs (matches de rugby ou de football en direct à l’occasion). Diffusion d’une musique de fond à volume réduit qui peut passer pour superflue (selon goûts).

Remarque : l’accès aux toilettes en sous-sol, raide et sans main courante, peut présenter un réel danger pour des personnes peu assurées sur leurs jambes, que ce soit de déficience naturelle ou d’ivresse - l’abus d’alcool est… Il existe des toilettes pour handicapés au rez-de-chaussée.

Clientèle : plutôt jeune, joviale et festive, voire parfois bruyante (le soda se consomme peu) mais sympathique : étudiants, employés d’établissements et de commerces voisins, etc… à l’intérieur comme à l’extérieur. Fréquentation soutenue pour cet établissement, auquel s’oppose peu de concurrence significative aux alentours.

Prestations : bar (happy hour), carte brasserie, burgers, cuisine irlandaise et anglaise, plat du jour, tapas, soirées sport en direct, fléchettes…

Voir et savoir :

https://www.theblacklion.fr/

 

 

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3 - Le Cardinal, place Wilson (métro Jean-Jaurès)

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                                 Image : X                               

                        Malgré ses dimensions plutôt modestes, ce café est l’un des plus fréquentés de la place, qui en comptait huit en 2019. Il est tenu depuis 1954 par la famille Ladevèze.

Accueil : 9/10

Personnel en place depuis de nombreuses années, toujours professionnel et agréable.

Bien-être extérieur : 7,5/10

Ludiques sièges de toile noire type « metteur en scène » en terrasse (avec noms d’actrices & acteurs sur le dosseret). Store et cloisons toile et plexiglass, chauffage hivernal au-dessus des places près du mur. De l’incontestable agrément du lieu, la terrasse est très fréquentée, et les sièges sont parfois très rapprochés (accoudoirs jointifs à certains moments). Exposition plein soleil l’après-midi très appréciable en hiver.

Bien-être intérieur : 8/10

Banquettes confortables, chaises un peu plus fermes. Tables hautes et tabourets hauts apparus en 2018 d’un confort discutable, plutôt orientés clientèle jeune.

Quelques places, exigües mais « royales » (guéridons pour 2 personnes maximum) tout contre les panneaux vitrés, très agréables en hiver, offrent, nez contre la vitre, l’impression d’être à l’extérieur avec une large vue sur la très passagère place Wilson, et son immortel manège pour enfants.

Chauffage : pulsé, très suffisant mais assez inégal (se tenir loin de la porte d’entrée incessamment ouverte et refermée desservant la terrasse en hiver).

Atmosphère agréable, et certains jours de pluie d’une joyeuse animation.

Deux grands écrans, volume en sourdine, montrent en permanence des images sélectionnées (sports, nature…).

Clientèle : diversifiée et cosmopolite en terrasse, plutôt âgée et habituée à l’intérieur en journée. Sorties de cinéma.

Prestations : bar, carte brasserie, tapas (à partir de 18h.), cocktails, coupes glacées.

Voir, savoir :

https://www.barlecardinal.fr/

 

 

La Voix du silence

« Le silence est l’élément dans lequel se forment les grandes choses » Maeterlinck

 

Deux silhouettes de hasard

tout près de la vitre embuée.

Gestes timides, voix retenues,

parole sublimée qui veut frôler le cœur

et dit si peu.

Et voudrait dire tant.

 

L’échange des regards,

qui soudain se fait trouble,

tout au fond du silence

relègue l’éloquence.

L’attente se fait doute.

 

Imprudente et tremblante,

la main s’élève et brise la réserve :

quelques gouttes de thé,

qu’un rayon clair traverse,

ont coulé sur le bois verni.

Et deux regards illuminés s’y croisent.

 

Entremetteuses délicates,

les perles qu’on ne boira pas

se font interprètes.

La retenue s’effrite, le geste prend naissance,

mais la tempête des mots qui grondait sourdement

s’en remet encore au silence :

 

Sur le bois clair, lisse et poli,

- rencontre un jour de pluie -

deux mains se sont unies.

 

 

Un jeudi de janvier 2018.

 

 

 

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4 - Le Cyrano, rue St Antoine du Touch (métro Jean-Jaurès)

 

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Image : X

 

                            Petit bar-restaurant sympathique proche de la place Wilson et du quartier St Georges, aux tarifs raisonnables.

Accueil : 9/10

Personnel très agréable.

Bien-être extérieur : 7/10

Une rangée de tables sur le trottoir, accolées au mur. Piétons et voitures proches, dans une rue assez calme toutefois. Terrasse plutôt occupée par clients s’attardant peu.

Bien-être intérieur : 9/10

Décor agréable et de bon goût, banquettes confortables.

Le cadre est calme, plaisant (éclairage tamisé), et on s’y sent bien.

Clientèle : diversifiée en terrasse, plutôt âgée et habituée à l’intérieur en journée. Sorties de cinéma.

Prestations : bar, petite restauration.

Voir, savoir :

Pas de site internet connu pour le moment, quelques avis :

https://www.yelp.fr/biz/le-cyrano-toulouse

 

 

Au « Cyrano »

 

                                         À une belle inconnue

 

Les deux pieds sous la table et devant un demi,

(Rêver du Monde Neuf pour lui c’est le jeudi)

Vint à passer, senteurs de cuir et talons secs,

Une beauté de rêve : « - Ce sera un blanc sec. »

 

Frôlant son guéridon, une hanche parfaite

Jeta son livre au sol. « - Pardon, je suis distraite,

Vous lisiez je le vois. Mais je crois préférable,

Si vous le vouliez bien, autour de cette table,

 

De la conversation goûter le vrai plaisir :

Voyez du magasin dont je viens de sortir

Ce très joli bustier dont je suis assez fière… »

- L’objet à lui tout seul eût attendri la pierre !

 

De grands cheminements se font dans sa pensée,

Il n’exclut pas le sexe et semble intéressé…

Mais se lève courtois, disant incontournable

Un horaire évoqué, paie et quitte la table.

 

 

Jyssépé, Sepembre 2019


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5 - Le Grand Café Florida, place du Capitole (métro Capitole)

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                               On ne présente pas le Florida aux Toulousains : pour beaucoup, sa seule évocation ranime, dans un sourire, des souvenirs joyeux, des anecdotes. Grande brasserie historique située face à l’entrée principale du Capitole (siège de la mairie de Toulouse) ; lieu tenu dans un premier temps par un chocolatier, ses débuts en tant que café datent de 1874. Le Florida figure parmi les plus grandes brasseries de France par le volume des boissons débitées. La plus grande d’Occitanie. Le « Flo » pour les intimes, estudiantins notamment.

On peut se trouver enthousiasmé par ce lieu tellement vivant au point de le fréquenter assidûment - comme le fuir : s’il ne l’a déjà, chacun se fera son opinion (ou pourra, à l’occasion, en changer).

Accueil : 9/10

Personnel en place de longue date pour certains, à la fois stylé, courtois, attentionné et de contact agréable, voire chaleureux, toujours très professionnel malgré l’imposant volume de clientèle. En deux postes et plusieurs échelons, l’établissement emploie une cinquantaine de personnes, voire plus en saison touristique où saisonniers, étudiants, stagiaires d’écoles culinaires, travaillent là, tous conscients d’avoir la chance de se trouver à la bonne adresse toulousaine.

Bien-être extérieur : 8,5/10

La terrasse de 300 places est, dit-on parfois, le centre nerveux de Toulouse. L’espace est divisé en deux par l’allée centrale : café à gauche restauration à droite, la limite fluctuant à la demande.

Les tables carrées au format unique permettent tous les assemblages côté restauration (nappes blanches), le côté café dispose de guéridons ronds traditionnels (pied fonte).

Tout affront sévère au pavé historique étant prohibé, tables et fauteuils (type canné) y sont directement posés. Ainsi, les jours d’affluence (très nombreux ici), l’atmosphère se fait un peu bruyante, chacun cherchant sur le pavé inégal la bonne position pour les quatre pieds de son fauteuil. Ce bruit de fond, vite oublié, est une des marques du Florida, dont jusqu’aux défauts sont appréciés. Le pied caoutchouc, trop vite usé par l’imposante fréquentation, fut tenté sans succès.

Bien-être intérieur : 9/10

Décor agréable et de bon goût, banquettes confortables. Style « belle époque » : fresques murales 19ième siècle, miroirs monumentaux peints au plomb par L. Bordieu datés de 1874.

Le cadre est calme et plaisant, et l’on s’y sent bien. Un piano droit à demeure offre parfois, au gré des pianistes de passage, quelque mélodie en sourdine.

Clientèle : très diversifiée et cosmopolite, plutôt jeune et féminine certains jours, d’autres plus masculine et âgée ; pas de règle véritable. Étrangère en saison touristique (pays voisins et asiatiques représentés) ; employés et hommes d’affaire en visite chez Airbus, représentants ; on y voit également les autorités locales (mairie), des artistes locaux ou de plus grand renom (le Théâtre du Capitole est en face) ; des étudiants, des écrivains ou des joueurs de rugby du « Stade ». Claude Nougaro ne manquait pas, lui non plus, de venir reposer ses pieds sous le guéridon au Florida.

Prestations : service café, tapas et restaurant 7 jours / 7 de 12 heures à 1 heure du matin, jours fériés inclus. Cuisine traditionnelle de qualité constante, poissons, fruits de mer, desserts maison. Les établissements Philippe FAUR de Foix (distingué « Meilleur glacier » par le Gault & Millau), ont une succursale sous le même toit et y préparent les coupes glacées ; ceux-ci vendent également crêpes et glaces en cornet (produits naturels) aux passants, qui ne manquent pas sous les arcades.

Voir, savoir :

http://www.leflorida-capitole.fr/fr/

 

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 Jour de rugby

 

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6 - Les Pêcheurs de Sable, port de la Daurade (métro Esquirol)

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Im. JCP

 

                                             Idéalement situé au port de la Daurade (départ de bateaux-mouches), lieu rénové et réhabilité (nouvelle plantation d’arbres, extension des jeux d’enfants existants, sièges et bancs, etc…), ce bar-petite restauration-guinguette est un des lieux de Toulouse où, les yeux sur le fleuve, sur les enfants qui jouent, sur quelques musiciens faisant cercle assis dans l’herbe, ou sur quelques saltimbanques des temps modernes, on se sent le moins en ville. Et, à la nuit tombée, on y danse.

Inondable et exclusivement terrasse, le lieu est saisonnier (mai-octobre).

Accueil : non noté.

Pas d’accueil : le client se rend au tout petit bar (de la taille d’une large fenêtre), y est servi, paie sur le champ et se retire boisson en main ou sur plateau vers la table de son choix. S’il y a des plats en commande (chauds ou non), un prénom est requis et l’on doit s’attendre à être hélée ou hélé par le serveur qui porte les plats à table.

Le personnel est d’un naturel agréable et jovial (jeunes saisonniers souvent étudiants). File d’attente parfois imposante aux beaux jours. Petite boîte à pourboires sur le comptoir.

Bien-être extérieur : 7/10

Comme dit plus haut, l’établissement se limite à la terrasse (dalle béton-piste de danse). Guéridons métalliques pliants et grandes tables conviviales, chaises pliantes bois-métal et bancs. Confort plutôt modeste donc, mais nul n’est là pour le moelleux. Vue sur le fleuve. Ombre de grands platanes complétée par quatre hauts et grands parasols, refermés vers 17 heures afin d’y accrocher les guirlandes lumineuses pour la soirée.

Le client débarrasse sa table, moyennant quoi les tarifs demeurent attractifs. Poubelles de tri sélectif près des toilettes.

Clientèle : diversifiée, plutôt jeune, et parfois conviviale malgré une smartphonomanie aussi aigüe ici qu’ailleurs.

Prestations : bar, petite restauration imaginative, tapas. Démarche écologique en restauration comme en boisson (bières, cidre et jus de fruits bio). Le demi « La Bise » le moins cher de la ville (avec ceux des parcs et jardins).

Guinguette par beau temps dès la nuit tombée. Ambiance sympathique et bon-enfant.

Fermeture 22 heures.

Voir, savoir :

Pas de site internet spécifique pour le moment, aperçu rapide :

https://www.toulouscope.fr/lieux/bars/pecheurs-de-sable/

 

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  Im. JCP

 

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Images : X

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Aux « Pêcheurs de Sable »

            

Tranquillement assis tout en bout de travée,

Cahier crayon en main et d’humeur concentrée,

Il composait des vers, ce jour-là fort mauvais.

- À ce jeu mal aimé personne n’est parfait.

 

Perdu dans la pensée, il sent soudain trembler

Le sol autour de lui, banc et table vibrer :

Quatre sœurs approchaient, et le plus délectable

Fut qu’elles le priaient de partager sa table.

 

La surprise passée, il se montra courtois,

Pour elles se levant du petit banc de bois.

De l’âge un peu lassé jusqu’au joyeux délire,

Sur les quatre minois il se pouvait tout lire.

 

Réunies dans la joie par l’avion par le train,

De bière en jus de fruit il sut tout* de ces femmes,

Mais vit, brûlant pour lui, un regard tout de flamme

- Au moment du départ : le Temps est assassin.

 

Des deux regards croisés par-dessus cette table,

L’un à l’autre attachés, seuls au monde un moment,

- Qui dans une autre vie auraient pu être amants* -,

Il voulut mettre en vers la rencontre improbable.

 

 

* Pour ma part j’en doute un peu. Ainsi sont les poètes…

JCP 13 Septembre 2019. Aux quatre inconnues des « Pêcheurs de Sable », quatre sœurs réunies là - d’humeur sympathique, joyeuse et vagabonde.

 

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7 - Le Père Léon, place Esquirol (métro Esquirol)

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                    Image : X            

                    Fondé en 1905 par Léon Sentenac sous le nom « Aux Caves du Père Léon », ce café-brasserie-hôtel, superbement rénové en 2012, demeure un des plus connus des Toulousains, dont le sourire à sa seule évocation en dit assez : une institution ancrée dans le temps. En tout huit débits de boisson sur la place en 2019.

Accueil : 9/10

Personnel à la fois stylé, courtois, attentionné, de contact agréable et très professionnel.

Bien-être extérieur : 6,5/10

La terrasse, qui comporte cinq grands parasols rectangulaires non liés (écoulements de pluie possibles) et non chauffés en hiver, se voit partagée en deux par un passage piétonnier incessant, et bordée par l’imposante circulation automobile traversant le carrefour en direction du pont Neuf ; gêne accrue d’un feu tricolore, d’un arrêt de bus et d’une bouche de métro. La rue St Rome voisine, commerçante et piétonne, est une des plus fréquentées de la ville. Indifférence au bruit, à la pollution et à la proximité de la foule requis en terrasse - ou passage fugitif. Celle-ci ne manque cependant pas de clientèle dès les beaux jours et jusqu’aux premiers froids.

Bien-être intérieur : 9/10

Banquettes et chaises confortables (skaï rouge), aménagement d’un luxe de très bon goût (chêne sombre et marbre rose recouvrant les radiateurs de chauffage central), éclairage doux d’imposants lampadaires de style (laqués blanc, grand abat-jour de verre blanc) parfaits pour la lecture et l’écriture, comme le travail sur ordinateur portable.

Probablement le lieu de la ville le mieux chauffé en hiver. On se sent bien au Père Léon, au point que le temps peut y devenir un ennemi.

Clientèle : diverse en terrasse, plutôt âgée et habituée à l’intérieur en journée.

Prestations : bar, carte brasserie traditionnelle, « Menu toulousain », « Menu gourmand ». Restauration uniquement le midi (fermeture 19h30), fermé le dimanche.

Divers : Ascenseur accès toilettes et restaurant à l’étage. Le bar est une très belle pièce d’ébénisterie, et la collection de vieilles bouteilles noircies contenant vins et spiritueux datant de 1905 est unique à Toulouse (sur grandes étagères au-dessus et à droite du bar).

Voir, savoir :

https://www.pere-leon.com/

 

 

Au « Père Léon »

 

Messagers du temps au noir regard que la poussière voile,

des siècles prisonniers observent, silencieux,

chaque jour qui se meurt et s’ajoute à leur âge.

 

Éclos du sillage empourpré des veinules de pierre,

de hauts champignons de lumière couvrent,

de leur blancheur sage, la litanie du faire aux tables parées.

Et des vapeurs sonores, animant à son terme la longue voie de marbre,

répandent dans les airs l’arôme des bonheurs apaisés.

 

L’éternelle continuité, qui toujours s’écoule au dehors,

perce de toutes parts le vaste écran des murs de verre,

où la vie se répète et ne meurt pas.

 

La brise aux effluves de rue

laisse entrer avec elle de nouveaux captifs,

conserve du dehors un œil sur eux puis,

soumise à leur vouloir, les libère débonnaire.

 

Et la porte de verre s’ouvre et se referme

entre deux longues bouffées de silence.

 

 

Novembre 2019

 

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8 - Le Wallace, place St Georges (métro Jean-Jaurès)

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            Image : X                  

                Ce café-brasserie, autrefois club privé (et renommé) sous le simple nom de « St Georges », et dont le gérant fut surnommé en son temps « Plus-Belles-Bretelles de Toulouse » - ce qui était la stricte vérité -, est aujourd’hui parvenu à attirer à lui la plus grande partie de la clientèle de la place, qui comptait en 2019 une dizaine de débits de boissons. Ceci grâce à sa vaste terrasse débordant sur la place, de prime abord timide et peu confortable à la réouverture sous le nouveau nom de Wallace, aujourd’hui couverte de parasols chauffés en hiver, et bondée par beau temps.

Accueil : 7,5/10

Personnel agréable, parfois un peu dépassé par la fréquentation en haute saison.

Bien-être extérieur : 9/10

Sous le vaste ombrage aéré d’un micocoulier plus que séculaire, le lieu est sans doute un des plus agréables de Toulouse. Pour qui goûte le calme et la verdure, la place St Georges, arborée, avec son jardin d’enfants miniature et ses forains fleuristes-légumiers, a des allures de quartier paisible. La circulation automobile, modeste et au ralenti, ne représente pas une gêne notable. Les piétons eux-mêmes y adoptent le pas du flâneur. Sièges cannés et guéridons ronds au plateau ornementé de publicités en sous-verre remplacées périodiquement.

Bien-être intérieur : 8,5/10

L’intérieur est assez exigu, mais agréable et lumineux et, si hautes tables et hauts tabourets sévissent ici aussi, il est possible, côté gauche face au bar, de s’asseoir plus confortablement et de façon traditionnelle. Deux grands écrans, qui montrent sports et actualités en permanence volume en sourdine, ne présentent pas de gêne notable.

Clientèle : jeune et en majorité féminine en terrasse, généralement plus âgée à l’intérieur.

Prestations : bar, carte brasserie, pas de pâtisseries ni de coupes glacées hors repas.

Voir, savoir :

https://www.lewallace.com/

 

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Citons pour clôturer ce poème de Louis Aragon, faisant état d'une tournée des cafés parisiens où le poète aimait, lui aussi, à s'installer pour écrire, et ces vers :

 

LES MOTS M'ONT PRIS PAR LA MAIN

Je demeurai longtemps derrière un Vittel-menthe
L’histoire quelque part poursuivait sa tourmente
Ceux qui n’ont pas d’amour habitent les cafés
La boule de nickel est leur conte de fées
Si pauvre que l’on soit il y fait bon l’hiver
On y traîne sans fin par la vertu d’un verre
Moi j’aimais au Rocher boulevard Saint-Germain
Trouver le noir et or usagé des sous-mains
Garçon de quoi écrire Et sur la molesquine
J’oubliais l’hôpital les démarches mesquines
À raturer des vers sur papier quadrillé
Tant que le réverbère au-dehors vînt briller
Jaune et lilas de pluie au cœur du macadam
J’épongeais à mon tour sur le buvard-réclame
Mon rêve où l’encre des passants abandonna
Les secrets de leur âme entre deux quinquinas
J’aimais à Saint-Michel le Cluny pour l’équerre
Qu’il offre ombre et rayons à nos matins précaires
Sur le coin de la rue Bonaparte et du quai
J’aimais ce haut Tabac où le soleil manquait
Il y eut la saison de la Rotonde et celle
D’un quelconque bistrot du côté de Courcelles
Il y eut ce café du passage Jouffroy
L’Excelsior Porte-Maillot Ce bar étroit
Rue du Faubourg-Saint-Honoré mais bien plus tard
J’entends siffler le percolateur dans un Biard
C’est un lieu trop bruyant et nous nous en allons
Place du Théâtre-Français dans ce salon
Au fond d’un lac d’où l’on
                                            voit passer par les glaces
Entre les poissons-chats les voitures de place
Or d’autres profondeurs étaient notre souci
Nous étions trois ou quatre au bout du jour assis
À marier les sons pour rebâtir les choses
Sans cesse procédant à des métamorphoses
Et nous faisions surgir d’étranges animaux
Car l’un de nous avait inventé pour les mots
           Le piège à loup de la vitesse
Garçon de quoi écrire Et naissaient à nos pas
L’antilope-plaisir les mouettes compas
           Les tamanoirs de la tristesse
Images à l’envers comme on peint les plafonds
Hybrides du sommeil inconnus à Buffon
           Êtres de déraison Chimères
Vaste alphabet d’oiseaux tracé sur l’horizon
           De coraux sur le fond des mers
Hiéroglyphes aux murs cyniques des prisons
N’attendez pas de moi que je les énumère
Chasse à courre aux taillis épais Ténèbre-mère
Cargaison de rébus devant les victimaires
Louves de la rosée Élans des lunaisons
Floraisons à rebours où Mesmer mime Homère
Sur le marbre où les mots entre nos mains s’aimèrent
Voici le gibier mort voici la cargaison
Voici le bestiaire et voici le blason
Au soir on compte les têtes de venaison
           Nous nous grisons d’alcools amers
                      Ô saisons
Du langage ô conjugaison
                                            des éphémères
Nous traversons la toile et le toit des maisons
Serait-ce la fin de ce vieux monde brumaire
Les prodiges sont là qui frappent la cloison
Et déjà nos cahiers s’en firent le sommaire
Couverture illustrée où l’on voit Barbizon
La mort du Grand Ferré Jason et la Toison
Déjà le papier manque au temps mort du délire
 
Garçon de quoi écrire

 

Jyssépé 11-12 / 2019

23 décembre 2019

Le Dictionnaire éventuel : 92 Hypocrisie

 

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Hypocrisie : désigne les pathologies du cheval se manifestant par crises.

 

 

17 décembre 2019

Cascade (1094)

 

 

Large cascade blanche animée par le vent

Et qu’un joyeux soleil rend pareille à la neige,

Tout au fil de ton cours se devine une trame

Disant que tu jaillis de cette corde à linge.

 

 

JCP 14/12/2019 Recueil "Quatrains"

13 décembre 2019

Méditation : la simplicité du Zen

 

 

DU CÔTÉ DU ZEN

 

 

 

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                         On peut assister actuellement à un certain attrait pour la « méditation*», dont les médias donnent une image lointaine et vaguement « branchée », lorsqu’elle n’est pas orientée vers le mercantile.

Le bonheur paisible auquel nous avons tous droit est de plus en plus inatteignable : la société « moderne » et tout ce qu’elle implique aujourd’hui s’y oppose. Résolument et de façon croissante. Le léger mal de vivre, l’insomnie passagère, comme les maladies nerveuses graves qui en découlent sont en nette expansion, et particulièrement dans notre pays (1er consommateur européen de psychotropes) où il semblerait que « rien ne va ».

Une réalité.

Y a-t-il des solutions à cela ?

Elles seraient politiques, mais il n’y a pas de ministre du bonheur.

C’est regrettable.

Ne reste qu’à apprendre à sourire sous le séisme.

Trois méthodes sont disponibles :

1 - L’alcool, les drogues, les dépendances de tout ordre dont celles, puissamment encouragées, à la consommation et au smartphone, apportent l’apaisement d’un instant avant de devoir en renouveler l’usage, toujours plus intensif et à l’infini. Vous pratiquez plus ou moins cette méthode : tout ça ne suffit pas pour atteindre le vrai bonheur, vous le savez.

2 - La pharmacopée, qui propose des produits immédiatement efficaces (somnifères, anxiolytiques, antidépresseurs) aux séquelles considérables. Si vous êtes liés.es à cette solution, vous êtes conscients.es qu’elle n’est pas sans risques et, à terme, vous savez qu'elle ne peut suffire.

3 - La troisième possibilité est la « méditation ».

Pratiquée assidument, elle a permis à de nombreuses personnes, depuis 2.500 ans, de retrouver le sourire même sous des conditions de vie peu satisfaisantes.

Elle est gratuite, facile et sans séquelles. Et même bonne pour la santé en général.

Seul bémol pour les gens pressés : elle exige du temps au quotidien.

Donc impossible pour une large majorité de personnes.

Hélas.

C’était la bonne solution.

Reste donc les deux premières.

Indétrônables, elles.

Désolé, tout ça pour rien.

La méditation, une aimable utopie sans doute…

 

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Vous persistez malgré tout à lire ces lignes ?

Bienvenue.

Nous ne changerons pas le monde, mais nous pouvons changer l’idée que nous nous en faisons. C’est par là qu’il faut attaquer : le mental et non le physique et la satisfaction des sens (qui n’est pas pour autant interdite !).

Ceci étant, la méditation n’est en aucun cas à considérer comme un médicament (il serait assez long d’en expliquer ici les raisons), que l’on abandonnera dès que « ça ira mieux ». Attacher un but ou un profit à cette pratique la corrompt immanquablement et la rend inopérante (certains disent plutôt le contraire, vous l’aurez peut-être remarqué).

Pourquoi plutôt le zen ?

Le zen est la branche du bouddhisme la moins attachée au rite, et donc la plus apte à une pratique laïque. Le zen peut se superposer à la majorité des croyances monothéistes, c’est déjà le choix de certaines personnes.

Zazen (méditation assise en japonais) est la méditation des origines. Pure, simple, dépouillée et non déformée, sans enflure ni décorum. Authentique, elle ne fait appel à aucune croyance, à aucun dieu : Bouddha était un homme qui espérait simplement rendre les humains plus heureux - sur terre. Uniquement cela.

 

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L’affiche ci-dessous propose une journée entière consacrée à la méditation. Peut-être ne pouvez-vous pas vous réserver tout ce temps : vous trouverez plus bas des options plus brèves.

- Ah, sous la direction d’un moine zen : c’est non, dites-vous.

- Pensez-vous qu’il soit des personnes mieux à même d’enseigner la méditation qu’un moine zen rompu à cela et avant tout à cela depuis de nombreuses années ? Leur nom m’intéresse !

Kensan Jean-Michel Pierre est un homme comme vous et moi qui, entre autres talents, possède ceux qu'on attribue à un moine zen. Comme dévouement, écoute, compréhension, compassion, calme, patience, simplicité.

- Pourquoi en groupe ? ajoutez-vous.

- Pour d’évidentes raisons qui font que l’on progresse plus rapidement et, surtout, sur la bonne voie. Celle dont, seul, on risquerait de dévier par une connaissance approximative de la pratique.

Des séances plus courtes (1 heure, 4 heures) sont proposées au dojo de St Simon (Toulouse) :

http://www.sudtoulousezen.fr/

 

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À bientôt peut-être au dojo. En toute simplicité !

Jean-Claude

 

* Il n’existe toujours pas de mot pour exprimer cette pratique dans sa réalité, le mot « méditation » en exprimant l’opposé, puisqu’il fait éminemment appel à la pensée.

 

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 RETOUR BIBLIOTHÈQUE ZEN

 

 

9 décembre 2019

Vieilles nuits de musique, d'amour et de paix (récit). Première partie (1/4)

Seconde partie : http://chansongrise.canalblog.com/archives/2019/12/17/37680094.html

Troisième partie : http://chansongrise.canalblog.com/archives/2019/12/24/37680111.html

Quatrième partie : http://chansongrise.canalblog.com/archives/2019/12/31/37680217.html

 

 

Introduction

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                             Infusé de ce je qui joue du moi sous le fouet d’un ego à satisfaire, le récit autobiographique coule rarement du bec de ma théière : ce texte est une exception. Ici, impalpable mais omniprésent, le personnage principal est la musique, vecteur de tous les possibles derrière lequel le narrateur a voulu s’effacer, bien que la première personne figure parfois au fil du récit.

Ce texte, esquissé en 2010 sur le blog « Parole de Musique » en commentaire aux photos prises (N&B 1970 / papier 13X18 - numérisé 2005), relate un évènement alors inédit en France : le festival de rock d’Aix-en-Provence qui eut lieu du 1er au 3 août 1970. Et que certains nommèrent « Le Woodstock français ».

Ayant rencontré un assez bon accueil (spectateurs, amateurs de rock, gens de radio, journalistes et musiciens de l’époque sont venus déposer leur témoignage - souvent ému - sur le blog), ce texte a été repris (style & contenu) à plusieurs reprises en vue de le rendre lisible, et ce n’est qu’aujourd’hui (novembre 2019) que je me résous à le rendre public.

Ce même article de "Parole de Musique" (voir lien en fin de page), a fait également l'objet d'un mémoire de master de de la part d'une étudiante versaillaise en « Recherche en histoire culturelle et sociale » ayant élu pour thème les festivals de rock des années 70. Ceci notamment avec l’aide dont je fus capable, parmi d’autres, de lui fournir. Son mémoire « de MASTER 2  Discipline / Spécialité : Histoire Culturelle du XXe siècle », autant par son originalité (son unicité sans doute) que le talent déployé lui valut, à ce que je compris, un bon accueil. Et si j’y eus ma très modeste part (mes souvenirs, mes photographies et ma participation à la relecture du texte final), j’en suis d’autant plus heureux, aujourd’hui encore.

Mieux que fait d’un seul assemblage de mots, on comprendra que ce texte est d’une matière vivante - très vivante pour moi. Et je ne peux le parcourir sans une vive émotion.

Ces lignes, agrémentées de photographies prises, sauf indication contraire, par mes soins, relatent donc cet évènement, exceptionnel tant du point de vue du nombre et de la notoriété des artistes invités que par le celui des spectateurs - qui ne sera pas évoqué : l'exagération se voulant quelque peu le nerf du récit, il serait multiplié par mes soins jaloux !

Plus sérieusement, je me suis attaché à faire revivre ces trois journées et ces deux nuits avec le plus de précision possible malgré une rédaction tardive (2010-2019), aidé en ceci par mon épouse qui était présente, les revues (Rock & Folk, Best) et les affiches conservées, les dires de musiciens. Remerciements empressés à Philippe Andrieu pour les courriels échangés, à Didier Thibault, bassiste et leader de « Moving Gelatine Plates », groupe de jazz-rock toujours actif, à François Jouffa par ses commentaires éclairés. Les recherches internet ont été un complément appréciable (les gestionnaires des archives numérisées de l’INA, notamment, se sont montrés très coopératifs).

Europe 1 « grandes ondes » retransmit les principaux concerts de l’évènement en direct – la FM n’était pas encore née dans notre pays ; et je pus disposer de l’enregistrement original du concert de Léonard Cohen du 1er août, d’une qualité sonore modeste car pris sur la radio en GO, et expédié gracieusement sur CD par Philippe Andrieu, alors à Paris et frustré de n’avoir pu assister au festival, et que je remercie une nouvelle fois.

Si certaines imprécisions ou erreurs ont pu être corrigées par des personnes présentes au festival m’ayant contacté d’elles-mêmes et ayant eu accès à de meilleures informations que les miennes, d'autres demeureront dans ce texte, probablement pour toujours...

Cette brève tranche de vie demeure à ce jour une des plus fortes, des plus chargées d’émotion, et des plus intensément vécues de mon existence. Pour comprendre ceci, il importe de se replonger dans le contexte de l’époque (post-68 de surcroît), et de l’avoir vécue en passionné de cette musique qui comportait bien plus que des notes, et s’inventait alors elle-même chaque jour, dans l’ignorance mercantile qui, aujourd’hui, corrompt toute tentative, talentueuse, sincère, enthousiaste et passionnée soit-elle.

 

                       Pour finir, si, par un heureux hasard, lectrice, lecteur, tu y étais (je te tutoie), écris-moi ! Et si (sait-on jamais) tu avais des photos, même ratées, jaunies et tachées, expédie m’en donc une copie en échange des miennes !

 

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Blog « Parole de Musique » :

http://paroledemusique.canalblog.com/

 

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REMERCIEMENTS

 aux personnes qui, de près, de loin, ou même sans le savoir, ont contribué à la rédaction du texte final :

Lisak, Sonia, Imago, Morata, Edmée de Xhavée, Denis Chollet (qui inséra trois de mes images dans son ouvrage "Nos années de poudre ça n'a pas traîné"),, Cold Blue, Daria, Martine (pour ses mots), Old Nut, Johanna Amar (pour nos échanges lors de la rédaction de son mémoire), Didier Thibault (Bassiste et leader de MGP pour son aide), Arthur Cerf (rédacteur à « Snatch Magazine »), Philippe Andrieu (pour son aide et la transmission gracieuse de l’enregistrement original de Léonard Cohen), Popallthedays, Wilfrid (pour ses infos), Ronan, Pat, MGP, Ditibo, Les Cafards, Logan31, Chantsongs.

Remerciements à Gilles Pidard (Cinéma et Musiques, université Paris Diderot-Paris 7).

Site Philippe Andrieu :

http://philippe.andrieu.free.fr/concerts/19700801/002-19700801-colosseum-johnny-winter-pete-brown.php

Remerciements à « Lucyintheweb » qui récupéra mes images pour en faire un article sur son blog personnel, affichant même, sans le savoir, mon propre portrait plein écran :

http://www.lucyintheweb.net/lucy/forum/viewtopic.php?t=7169

Autre utilisation des mêmes images sur facebook :

https://www.facebook.com/lesinstantsdete/posts/2701936169840092?comment_id=2709122655788110

Moving Gelatine Plates :

http://rock6070.e-monsite.com/pages/blues-et-rock-en-france/moving-gelatine-plates.html

 Johanna Amar est diplômée d’un master de recherche en histoire culturelle et sociale à l’université de Versailles Saint-Quentin-en-Yvelines. Elle est rattachée au laboratoire du Centre d’Histoire Culturelle des Sociétés Contemporaines. Son mémoire porte sur les « Premiers festivals de musique pop en France en 1970 » sous la direction d’Anaïs Fléchet :

https://dumas.ccsd.cnrs.fr/dumas-01872518/document

 

 

JCP, 03/10/2019

 

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C’est peut-être à travers leur musique que l’on perçoit le mieux les générations nouvelles.

 

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Aix en Provence, 1970 : image d'un couple inconnu (colorisée par les moyens modernes)

 

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Festival rock d’Aix-en-Provence, les 1, 2 & 3 août 1970

(RÉCIT)

             

                                En cette année 2019, le légendaire festival de Woodstock vient de fêter à New-York son cinquantième anniversaire. Ne nous sentons pas en reste, et célébrons par ces modestes lignes le 49ième de celui qui fut qualifié par certains de « Woodstock français ».

NOTE : les noms des groupes et des personnages qui ont animé ce festival historique comportent un lien internet vers des sites documentés.

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PREMIÈRE PARTIE : LA ROUTE DU ROCK

 

1

                                Lassés des soleils assassins du sud de l'Espagne, de ses campings poussiéreux à l'ombre rare, et de ses eaux minées d'urticantes méduses, ce fut un soulagement que d'apprendre l'évènement salvateur - comme sans précédent : Trois jours, trois jours pas moins en un vaste décor campagnard, près d'Aix en Provence, soumis là aux seules lois de Musique et de Paix. On attendait là des artistes de grand renom, tels The Flock, Pete Brown, Johnny Winter, Mungo Jerry, Rare Bird, Titanic, Léonard Cohen et Colosseum, en sus des meilleurs groupes français.

Sous l'éclairage aveuglant "Camping Gaz", lampe posée à même la carte Michelin, oreille collée au poste radio de réception lointaine sur les grandes ondes, l'addition laborieuse affichait mille-cinq-cent kilomètres : Benidorm-Aix en Provence.

Gratifiée de l'huile nouvelle que réclamaient ses capricieux rouages, la Renault Huit, chargée jusqu'au plafond de produits vitaux tels que Moscatel, Pastis, Cognac espagnol, Anis del Mono, Touron et cigarettes, s'élançait déjà sur l'autoroute, ses quarante-huit chevaux tous libérés pour ce galop torride, sans merci pour la mécanique. A l'issue d'un répit décidé à mi-parcours sur la Costa Brava pour une nuit, nous voici en pleine ville d’Aix, en quête de la billetterie pour le festival. La ville regorgeait de monde – et de beau monde – on n’avait jamais vu ça ... les Aixois non plus d’ailleurs, moins enthousiastes que nous pourtant à la vue de ces envahisseurs, le vêtement coloré, chevelus et rarement fortunés : cinquante-cinq francs l’entrée suffisaient à mettre à mal ces jeunes bourses, et de ce qui pouvait y rester, on tirait plus de quoi payer la baguette et la boîte de pâté que le menu des restaurants huppés du centre-ville.

 

 L'impensable affiche (presque tous se produisirent, certains gratuitement, d'autres, qui n'étaient pas à l'affiche, s'invitèrent)

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2

                             Quelques provisions de bouche faites, nous prîmes la direction du site du concert, repérable à l’embouteillage interminable d’autos et de piétons lourdement chargés, entrecoupé de compagnies entières de CRS armés et casqués : l'évènement, sans précédent sur le territoire, cette masse de jeunes dont la tenue comme la coiffure dénotait l'esprit mal nourri, exigeait les grandes précautions - encore heureux s’il ne fallait pas user de grenades lacrymogènes avant ce soir. Les ambulances se tenaient prêtes, un peu à l’écart, et un hélicoptère de la gendarmerie allait et venait, sous les huées et les poings levés de la foule bariolée.

Nos auto-stoppeurs allemands expressément venus de leur pays lointain et l’auto laissés dans un immense champ, encombrés de nourriture et boisson, vêtements et couchage, il ne restait plus, ultime étape, qu’à pénétrer dans l’enceinte - dont nous longions, en fourmilière patiente, l’imposante clôture grillagée qui ne montrait pas sa fin. L’entrée n’était pas en vue que la file s’immobilisait déjà, alors qu'au loin la foule grandissante débordait des barrières qui ne parvenaient plus à la freiner, sous un désordre à la rumeur inquiétante. On patientait fébriles, parlant musique, prix excessif des places, possibilités de boire et se restaurer à l’intérieur, parfois dans le pauvre anglais appris au lycée, avec quelques voisins de notre pays de France - où avait lieu l’évènement !

Mais au loin, la rumeur de foule monte en clameur.

Et les CRS, jusqu'alors masqués par les champs de maïs, soudain paraissent et se rapprochent, dans des alignements de casques et de boucliers éclatants sous le soleil. On a secoué, profané, renversé, piétiné même la clôture - symbole de la dictature de l’argent et de la société de consommation, enfin mise à bas d'un effort commun - l’affrontement est inévitable.

Des coups, des cris se font entendre, au loin on se bat semble-t-il. Les CRS se ressaisissent, referment les brèches où tant se sont engouffrés déjà, refoulent la horde sauvage et prennent position devant le grillage, relevé à la hâte.

Partant d'une éventualité non confirmée, les radios annoncent l’annulation du festival. L’information est reprise à l’intérieur de l’enceinte où nous avons pu pénétrer en payant - répréhensible moyen petit-bourgeois qu'il vaudra mieux taire, si l’on souhaite ici faire bonne figure.

 

3

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                    Ce fut donc sans violence que les barrières s’ouvrirent pour nous. Quelques milliers de personnes étaient déjà dans la place, perdus dans cette immense prairie toute entourée d’arbres - un lieu superbe - mais on était là pour la musique. Et c’est d'un empressement fébrile que tous s’approchent du saint lieu : la scène, immense, vrai pont de porte-avions, est envahie déjà d'une fourmilière de road-managers qui courent, portent, poussent, roulent, empilent, assemblent, câblent, testent les micros, les instruments : on ne nous a pas menti, c’est bien ici que ça se passe !

Dressées de part et d’autre de la scène, deux hautes colonnes de treillis métallique débordent d’un empilement gigantesque d’enceintes de sonorisation des meilleures marques, américaines : le fin du fin du haut-parleur, une débauche de « JBL », d' "Altec-Lansing" de toutes tailles, du jamais vu pour beaucoup au pays de France.

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Alors, en gamins fébriles au sapin lorsque le Père Noël s’est surpassé, la foule arpente l’étendue, ne se fixe pas, court de la scène au bocage, des stands de boissons à ceux de nourriture, où déjà l’on carbonise la merguez et tranche la baguette dans des fumées et des senteurs plutôt appétissantes.

On découvre les toilettes, que peut-être Cromagnon lui-même eût trouvées rustiques, simple plancher à claire-voie jeté sur une longue tranchée, près de la clôture, et masquées par une haie d’épineux qui, opportunément, se trouvait là. On avait creusé cette fosse de quelques coups de pelle mécanique. Elle serait refermée de même, et l’on peut ici augurer d’une herbe plus verte que partout ailleurs, questionnant peut-être quelque génération future de géologues fébriles, pelle et brosse en mains, quant à l’humus local particulièrement fertile.

La contemplation de cet incroyable alignement de postérieurs des deux sexes - certains plus remarquables que d'autres - dans l’exercice de leurs fonctions naturelles, fut pour beaucoup un choc révélateur : pourquoi exiger plus que le nécessaire, ces quelques planches ne suffisent-elles pas ? Qui n’a pas de papier en obtient immédiatement de son voisin, de sa voisine, tous heureux du partage et de la main tendue ! Certaines et certains y perdirent, dans la nécessité, d’un seul coup d’un seul, leur pudeur et leur ingénuité post-adolescentes, irrémédiablement tombées là, à la fosse.

Quant aux douches car, raffinement supérieur, il y en avait, un simple tube d’une bonne cinquantaine de mètres, suspendu à bonne hauteur et percé de loin en loin d’un groupe de trous faisait amplement l’affaire. Et les eaux qui, au mépris de tout robinet, coulaient en permanence, rejoignaient simplement le ruisseau, heureux de sa contribution à l’hygiène générale et trouvant là une distraction inégalée. Humbles et rares, quelques savonnettes circulaient de main en main, s’en retournant par le même chemin vers leur propriétaire, qui parfois ne les reconnaissait pas, rétrécies à peau de chagrin. Que de leçons à tirer : quelle décontraction paisible, quelle sérénité, quel bonheur dans cette nudité collective tant réprouvée des parents, des religions, des autorités et des traditions, dans cette absence d’arrière-pensées, dans ce rejet concerté - sans même avoir à le dire - des idées reçues ! Et l’on voyait couler et s’enfuir au loin une eau impure, chargée des noirs préjugés enfin lavés et qui, de ce ruisseau, rejoindraient la mer pour s’y noyer à jamais !

Il y avait pour sûr beaucoup à faire pour rendre meilleure la société d’interdits et de frustrations de nos pères, et tant à défaire aussi. On allait s’atteler à la tâche, lourde, longue et difficile soit-elle, tous unis, solidaires dans l’effort, on repousserait les barrières mentales avec les mêmes arguments que celles du vaste champ - il n’y aurait d'ailleurs plus de barrières - pourquoi des barrières... A-t-on demandé des barrières ?

Comme il fera bon vivre en ce monde neuf, créé par nous, créé pour nous, et non par et pour les dirigeants, au seul profit de cette minorité qui nous exploite vilement et s’enrichit, grasse de notre consentement encore aveugle et de notre labeur !

 

 

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Fin de la premiere partie (1/4)

 

 

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Le festival de pop music d'Aix en Provence en vidéo

À SUIVRE....

 

  JCP

9 décembre 2019

Vieilles nuits de musique, d'amour et de paix (récit). Seconde partie (2/4)

 

SECONDE PARTIE : LEONARD COHEN ET LES AUTRES

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                            Cependant, au beau milieu de cette pelouse qu’un troupeau de moutons affamés n’aurait pas mieux réduite, il commençait à faire chaud, très chaud sous ce soleil du mois d’août sans la moindre brise. Certains, sans doute venus du nord et craignant le soleil de Provence, construisaient déjà des abris de branchages, recouverts du vêtement inutile de jour, de feuillage, et s’y logeaient avec délices. On renouait là avec les acquis d'une enfance proche encore, à laquelle les loisirs électroniques du vingt-et-unième siècle, addiction débilitante inconnue, n'avaient pas retiré savoir-faire, imagination, créativité, habileté manuelle et gestion de soi-même : les cabanes avaient du style et l'on rivalisait de conceptions comme de formes, simple auvent de branches tressées, hutte carrée percée de fenêtres, ou tipi à l'indienne autour de quelque arbre séculaire ; et l'on couronnait la construction de quelque oriflamme, chemise ou foulard bariolé que la chaleur rendait inutile.

Assis dans l'herbe on malmenait la guitare, chantant et percutant les peaux comme des forcenés : on était là pour la musique ! Les têtes oscillaient en cadence ; de chaque coin d’ombre s’exprimait, dans des reprises approximatives ou des créations stupéfiantes, tout le génie musical de cette époque, époque que nul encore ne savait bénie, où le plus marginal, le plus ésotérique des assemblages de notes jamais entendues ensemble était le bienvenu, pourvu qu’il soit éloigné des standards du passé, et que la musique de l'Ère Nouvelle soit originale et de qualité !

 

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Accoutumés au soleil, qu'il fût toulousain comme espagnol, nous nous plaçâmes en plein champ, marquant simplement la place de nos matelas, sacs et duvets disposés dans l’herbe. Le nombre des spectateurs grandissait d’heure en heure, parfois d'une lente progression, parfois dans des galopades à faire trembler le sol, lorsqu’un groupe venait de pratiquer une nouvelle brèche dans cette clôture, objet de toutes les haines où s’engouffrait alors, esquivant les CRS, un flot de resquilleurs essoufflés, hilares et poing levé, égratignés parfois et fondus au plus vite dans la masse présente.

Curieusement, on ne parlait plus de l’interdiction du festival, et la sonorisation géante diffusait les grands succès de la scène rock, ceux que les radios nationales passaient peu. Comme, immense et lancinant dans ce théâtre de verdure le « In a Gadda da Vida » de l’Iron Butterfly, long morceau occupant une face de microsillon, et mettant particulièrement en valeur, à l’issue du long solo « fuzzy » du guitariste, un des batteurs les plus appréciés de la scène Rock de ces années-là. Inoubliable comme le "Jingo" de Santana, jeune groupe venant de s'illustrer au fameux festival de Woodstock par son leader et guitariste, mais aussi par son très jeune batteur, Mike Shrieve, dix-sept ans, à l'incroyable talent déjà.

De temps à autre, quelque annonce de recherche se faisait depuis ladite sono, comme dans de telles assemblées où il est aisé de s’égarer, voire nécessiter soins et médicaments.

 

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                                   Mais déjà quelques accords de guitare, suivis d'une rafale  rageuse de coups de grosse caisse, font dresser les têtes et accourir les flâneurs : les trois musiciens de « Triangle » sont en place : c’est bel et bien parti ! Rapidement annoncés, ceux-ci démarrèrent en force avec leur tube : « Peut-être demain », solide hard-rock à la française ; un certain succès malgré la difficulté du rôle : ouvrir le festival. Le public attendait les grosses pointures...

Et ce fut dès la seconde prestation, que nous prîmes véritablement conscience de l’immensité de la scène qui permettait, lorsqu’un groupe jouait, que l’on désinstallât le matériel de celui qui précédait, et mit en place celui du suivant, tout cela simultanément : belle organisation, qui tournait parfaitement rond, au moins du point de vue du spectateur.

La sono nous apprit alors que le festival était un fiasco financier considérable, et que Claude Clément, général en retraite qui avait obtenu ce beau terrain nommé domaine St. Pons, organisateur de la manifestation, allait boire hélas un triste bouillon - nul n'était certain de la poursuite du festival jusqu'à son terme. Des bruits, des informations contradictoires, invérifiables, se suivaient : les groupes ne pouvant être payés, on allait vider les lieux dès le lendemain, ou bien au contraire tout allait rentrer dans l’ordre, et le festival se déroulerait comme prévu. Les resquilleurs ne paradaient plus, et certains les montraient même du doigt, convaincus de leur responsabilité quant aux cachets manquants pour les artistes.

La vérité était qu’on ne pouvait mécontenter ce trop vaste public, installé désormais : on craignait trop l’émeute et la destruction dans des affrontements sanglants avec les CRS, dont on porterait la responsabilité : Mai 68 était trop proche dans les mémoires, une étincelle suffirait à raviver la terrible flamme qui n’était qu’en veilleuse. Mieux valait offrir ce pourquoi ces centaines de milliers de jeunes étaient venus, et qui les apaiserait à coup sûr : de la musique - quittes à perdre beaucoup d’argent ; on allait d’ailleurs aviser et tenter d’étancher l’hémorragie...

C’est ainsi que les groupes français, jouissant d’une notoriété moins vive qu’Anglais ou Américains, et satisfaits de se produire devant un public aussi imposant, déclarèrent tous abandonner leur cachet : ils furent acclamés pour ce geste plein de noblesse.

Mais un certain Canadien anglophone déjà fort connu, Leonard Cohen, ne souhaitait aucunement rabattre ses prétentions ; non seulement il maintenait son exorbitant cachet, mais il eut encore des exigences de diva : le comité dut à ses frais louer des chevaux, pour lui et sa troupe, et il parut sur scène juché sur le dos d’un superbe étalon blanc, pour lequel il fallut établir une montée de bois, au grand dam d’une bonne part du public, sous les huées et des sifflets nourris. Certains déclaraient, non sans raison, que les fantaisies et les prétentions exorbitantes de cet artiste à la personnalité décevante, qui croyait être ici la seule vedette, alors qu’on pouvait l’imaginer sincère et généreux à ses textes, avaient eu raison du festival, festival qui pourtant semblait se dérouler sans encombre, et sans défections notables. Une annonce officielle déclarait alors le festival "libre", et l'on retira les barrières - qui avaient assez souffert.

 

Leonard Cohen à Aix, 1er Août 1970

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Leonard Cohen et le cheval de location avec lequel il monta sur scène (image : Sylvie Lèbre de "Pop Music")

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Image : "X"

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Vidéo avec les chansons "Révolution",  "Bird on the Wire" et certaines de mes images :

"Bird on the wire"

Site Twitter Johanna Amar :

https://twitter.com/Johannaam78/status/797040749158207492

 

 

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FIN DE LA SECONDE PARTIE (2/4)

JCP

9 décembre 2019

Vieilles nuits de musique, d'amour et de paix (récit). Troisième partie (3/4)

Première partie : http://chansongrise.canalblog.com/archives/2019/10/02/37679962.html

Seconde partie : http://chansongrise.canalblog.com/archives/2019/12/17/37680094.html

Quatrième partie : http://chansongrise.canalblog.com/archives/2019/12/31/37680217.html

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TROISIÈME PARTIE : HARE KRISHNA, MOUNA...

 

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6

                     Ce fut « Rare Bird », groupe pop anglais, avec son tube du moment « Sympathy » qui suivit Triangle et les autres groupes français,  puis « The Flock », groupe américain dirigé par son talentueux violoniste : c’était parti pour trois de musique, d'amour et de paix.

Aux temps plus calmes des matinées, sous le beau soleil qui ne nous abandonnait pas plus que la musique, de vastes attroupements se produisaient autour d’un curieux groupe qui n’était pas à l’affiche, ignorant des guitares, tous "coiffés" et vêtus tels les moines bouddhistes - de blanc cependant ; l’un animait un orgue portatif, les autres diverses tablas et clochettes, et tous chantaient à l’unisson, sur un ton lancinant plus que répétitif les mêmes phrases, lancées à l’infini, dont voici un aperçu - qui ne sera pas traduit, tant certains mots sont explicites.

« Hare Krishna Hare Krishna
Krishna Krishna Hare Hare
Hare Rama Hare Rame
Rama Rama Hare Hare

Love love
Love love
Drop out
Drop out
Be in
Be in

Take trips get high
Laugh joke and good bye
Beat drum and old tin pot
I'm high on you know what
Marijuana marijuana
Juana juana mari mari
High high high high
Way way up here
Ionosphere

Beads, flowers, freedom, happiness
Beads, flowers, freedom, happiness ... etc ».

Ce groupe, "Rahda Krishna Temple", qui parcourait le camp sans lassitude, eut un succès plus que notable, faisant opérer par places quelque « sitting » autour d’eux. Attentif et silencieux, le public les entourait alors. La musique et les incantations cessaient, laissant place à la voix de l’orateur qui présentait une philosophie de vie très librement inspirée de l'hindouisme. Ce n’était certes pas une religion, mais une manière de vivre tendant au bonheur universel, dans l’amour, le respect de l’autre, la tolérance universelle, la non-violence, et dans l’absence des trop nombreux interdits de notre société. Cela faisait mouche, une bonne part de ces idées-là était directement perçue et approuvée par ce public. Certains, intéressés, questionnaient l’orateur, des débats se créaient autour de commentaires témoignant plutôt de simple curiosité dans les débuts, puis qui prirent des tournures constructives et s’animaient longuement.

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Mais le discours de ces disciples de Krishna ne se contentait pas de prôner la paix et l’amour universel, il proposait même, tel Bacchus la consommation du vin, que l’on s’adonnât, pour mieux percevoir les bienfaits de la paix dans l’amour et la musique, à la consommation raisonnée du cannabis. Encouragements peu nécessaires, la verte feuille multilobée, odorante et fleurie, circulait ici à tout va, comme son agglomérat plus ou moins concentré, plus ou moins efficace et trafiqué, le hashish.

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Avec George Harrison des Beatles en 1969 (image : X.)

 

 7

                              Une péripétie vaut peut-être d’être contée ici : près de nous, un groupe d’Allemands - par ailleurs plutôt discrets - vendait quantité de drogues supposées douces, mais aussi de plus rudes, et satisfaisait à la demande importante, soulevant un assez bel attroupement. Ils s’effacèrent dès la nuit, et furent oubliés... Jusqu’au lendemain matin, où quantité des clients de la veille, la mine défaite et visiblement mécontents, vinrent m’agresser, personnellement : je ressemblais fâcheusement, barbe, carrure, yeux clairs et cheveux longs à leur faux dealer étranger. Fort heureusement l’entourage me soutint, déclarant l’Allemand et ses acolytes évidemment enfuis d'une part et que, exempt d'accent germanique comme ils pouvaient le constater d'autre part, ils se portaient garants de ma personne. Ces sans-scrupules vendaient au prix fort de l’"acide" et du "LSD" entièrement bidonnés, simples tablettes et comprimés de somnifère probablement, leur laissant le temps d’accomplir le forfait jusqu'à épuisement du stock - et d'opérer la nécessaire fuite clients endormis. Ils n'étaient pas là pour la musique.

Les organisateurs en furent avertis, et mirent le public en garde quant aux contrefaçons, l'engageant aussi bien à rouler quelque inoffensive feuille, plutôt que de partir dans des trips incertains sous des chimies incontrôlées ! Hélas, certains ne se satisfaisaient pas de ces amuse-gueules végétaux, déjà passés qu’ils étaient au stade d’où l’on ne revient pas sans dommages : la cuillère, la bougie et la seringue à poire, dangereux accessoires !

On ne déplora cependant aucun accident grave, qu’il soit « mauvais trip », maladie naturelle ou blessure sévère, pas plus que d’accouchement ni de décès sur le pré (au regret probable de certains journalistes ?) et le festival put se poursuivre, contre toute attente, sous les meilleurs auspices, dans le calme et en toute liberté.

La musique trouvait un peu de répit en fin de nuit (de trois à six heures approximativement), pour reprendre avant le petit déjeuner, qui se limitait pour la plupart à quelque biscuit trouvé au fond du sac. Pain et viennoiseries s’obtenaient sous les arbres au terme d’une queue considérable, et l'approvisionnement peinait à suivre. Pourtant nul ne se plaignait, et beaucoup oubliaient même la faim, ivres de musique et de liberté, certains de voir s’écouler là les heures essentielles, les heures les plus intenses de leur vie, fébriles à les vivre pleinement.

  

 

8

             Dès que la température matinale permettait de raréfier le vêtement, voire n'en porter aucun, nous étions à nouveau gratifiés des mêmes scansions krishniennes, mais aussi de discours divers, plus au moins talentueux comme applaudis, de personnages liés autant à la politique, au journalisme, qu’à la musique où à la radio. Les moments forts, ceux qui retenaient le plus l’attention du public étaient cependant les interventions de « Mouna », personnage haut en couleurs, penseur et philosophe, impliqué dans toutes les manifestations, comme dans l’aide sans partage à ceux qui avaient déjà sombré dans les drogues dures. A l’issue de ces trois jours, cet homme remarquable vit sa notoriété, déjà grande, atteindre des sommets. Décédé en 1999 à l’âge de quatre-vingt-huit ans, Mouna, comme le déclarait Cavanna, « était une manif à lui tout seul ».

Ne résistons pas à exhumer quelques-uns de ses aphorismes les plus savoureux :

 « - Le jour où un vélo écrasera une auto, il y aura vraiment du nouveau.

    - On vit peu mais on meurt longtemps.

    - Je préfère le vin d’ici à l’eau de là (emprunté bien sûr à Francis Blanche).

    - Riez et vous serez sauvé.

    - Les valeurs morales ne sont pas cotées en bourse.

    - Mieux vaut être actif aujourd’hui que radioactif demain.

    - Au pays de la barbarie, je joue de l’orgue de Barbarie !

    - Nous sommes tous égaux, mais certains sont plus égaux que d’autres.»

 

On pourra noter que certains humoristes reprirent, plus tard, ces traits d’humour.

  

 

9

                         Cependant, malgré la protection des larges attributs capillaires, le soleil des après-midis chauffait dangereusement les crânes : des décisions de survie s’imposaient. On résolut de rafraîchir la foule d’une forte lance à incendie disposée à demeure et dont les pompiers, par bonheur, n’avaient pas l’utilité. Ce fut une ruée instinctive, nul n’était besoin d’indiquer la marche à suivre, il suffisait de s’humecter amplement sous le jet pour retrouver un certain bien-être, échappant ainsi au risque d’insolation.

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Or, la gerbe salvatrice eut un effet pervers : le sol, changé en boue sous la mitraille du jet puissant, colorait les épidermes de façon peu seyante. La peau, séchée au soleil, tournait au bizarre : on n’arrivait guère à sortir propres de cette gangue d’autant que certains, en gamins au bac à sable, lançaient à tout va des poignées de boue, atteignant même le matériel d’un cameraman de l’ORTF fort dépité ! D’autres enfin, glissaient pieds nus sur la surface incertaine de cette patinoire improvisée, chutant et disparaissant jusqu'au cou dans le marécage. En outre, on souillait notablement le peu de vêtement porté, aussi fût-il rapidement abandonné, jeté dans l’herbe avec mépris. Alors, non seulement l’on se sentait tous égaux dans la nudité, mais encore il n’était par la boue qu’une seule et unique couleur de peau : le racisme n’avait plus de sens, aboli définitivement. La vivace hiérarchie esthétique du bronzage laissait aussi place à l’uniformité, et, en outre, nul ne brillant par la richesse du vêtement, on atteignait l’égalité vraie. On était bien les inventeurs du Monde Nouveau, qui naissait sous nos yeux de ce microcosme, et qu’il suffirait de répandre et de multiplier !

Ce fut à partir de ces moments d’intense activité, physique comme émotionnelle et mentale, qu’un pourcentage assez notable du public, clamant haut la vanité du vêtement, se refusa résolument et ostensiblement à en user - excepté dans la fraîcheur nocturne, où il dut bien reprendre ses droits jusqu’à l’aube, dans l'attente du nouveau soutien de l’astre solaire.

 

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FIN DE LA TROISIÈME PARTIE (3/4)

 

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Comme mon ego impatient me le dicte, l'image jaunie du couple se tenant par la main reçut le prix FNAC-CANAL+ pour le quarantième anniversaire de Woodstock, soit en 2009, et fut affichée dans les "FNAC".

JCP

9 décembre 2019

Vieilles nuits de musique, d'amour et de paix (récit). Quatrième et dernière partie

Première partie : http://chansongrise.canalblog.com/archives/2019/10/02/37679962.html

Seconde partie : http://chansongrise.canalblog.com/archives/2019/12/17/37680094.html

Troisième partie : http://chansongrise.canalblog.com/archives/2019/12/24/37680111.html

 

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QUATRIÈME & DERNIÈRE PARTIE : 0,7 mm X 3 = 2,1 mm*

 *  Voir en fin de texte

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10

                   Sur scène dès la nuit tombée, Mungo Jerry fit danser la mer des chevelures dans des rythmes fous, emmenant le public, levé d’un bloc par sa voix tempétueuse, dans une houle à donner le tournis, et dans l’écume vive des bras levés blanchis par les projecteurs, qui de temps à autre incendiaient la foule en délire. Ce fut un très beau succès populaire, incontestable moment fort du festival.

Le bluesman blanc Johnny Winter fut de même très acclamé, dans cette musique universelle, comprise de tous, émaillée des longs solos de ce talentueux guitariste américain au cheveu d’albinos.

Léonard Cohen, qui ne fit pas l'unanimité par son comportement, sut se racheter par sa musique et sa voix qui - un peu monocorde -, parvenait cependant à faire sombrer certains spectateurs dans un demi-sommeil, harassés par la rude journée au plein soleil et l'heure tardive. Ses interventions parlées, sur la paix dans le monde et l'utopique amour universel, furent applaudies, malgré la persistance de quelques sifflets.

"Titanic", groupe sans grande originalité venu des pays nordiques, proposait quant à lui un hard-rock traditionnel des plus chaleureux qui, s’il ne nécessitait pas vraiment l’écoute attentive par la richesse de sa musique, fit lever et danser le public durant la prestation entière. En tournée française, Titanic se produisit près d'Albi en 1973.

L’inénarrable Pete Brown, avec son groupe « Piblokto !», capable de longs solos inspirés et ses percussions, connu comme poète et compositeur, et à qui certains artistes de la scène Rock (Eric Clapton notamment) doivent quelques-uns de leurs meilleurs succès, fut également très applaudi. Pete Brown se produisit en 1972 au théâtre du Taur à Toulouse.

Cruellement juxtaposés à ces artistes, les groupes français souffrirent quelque peu de la comparaison : le rock, qui ne naquit pas chez nous, n’y trouvait pas encore ses meilleurs interprètes, et s’y enracinait difficilement. Ils se firent cependant connaitre et certains, comme Triangle, connurent une vraie notoriété des années durant (Pour mémoire, le tonitruant concert de la Halle aux Grains de Toulouse en 1971, qui laissa l'auteur de ces lignes dans une surdité notable jusqu'au lendemain). On ne proposait pas encore de bouchons d'oreille aux concerts de hard-rock, dont le niveau sonore atteint aujourd'hui l'intolérable...

Ce fut "Colosseum", talentueux groupe anglais de jazz-rock, aux solos de saxophone très attendus et applaudis de Dick Heckstall-Smith qui, la dernière nuit, clôtura pour ainsi dire le festival ; les groupes français qui le suivirent firent moins l’unanimité, desservis par la relative somnolence du public aux heures tardives.

Ci-dessous : Colosseum (Dick Heckstall-Smith au saxo, à droite)

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"Catherine Ribeiro + Alpes", à l’heure où les têtes émergeaient encore des duvets, put cependant étendre ici son auditoire et affermir sa jeune notoriété.

Alors, de lassitude, les musiciens ayant tous exprimé la quintessence de leur art, public et orateurs épuisés, il fallut bien débrancher amplis et projecteurs.

 

Un grand silence se fit alors dans la fraîcheur de cette fin de nuit, laissant scintiller un temps encore et s'éteindre insensiblement un dernier murmure au fond des oreilles comblées.

  

 

11

                              Malgré la chaleur de la veille, une fraîche rosée s'était posée sur l'herbe au cours de cette dernière nuit ; et s'extraire au petit matin de sa couverture ou de son duvet, à même le sol jonché de papiers, d'affaires oubliées, se faisait dans le regret des plus beaux rêves écourtés. Certains allumaient des feux de camp, auxquels les plus transis, moins prévoyants sur le vêtement emporté, venaient un moment se réchauffer. La musique s’était tue, mais de nombreux irréductibles n’entendaient pas se retirer encore ; alors que certains dormaient, abrutis pour une bonne part des excès de la nuit.

Et ces flammes paisibles qui s’élevaient couronnées de fumeroles, dressées de loin en loin parmi les corps étendus aux pieds des rares marcheurs silencieux, donnaient à la prairie dévastée, où la nuit s'attardait encore, des airs mornes de champ de bataille.

 

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Dernière fin de nuit, peu après la clôture du festival par "Catherine Ribeiro + Alpes". Des discussions animées ont encore lieu sur la scène au lever du jour. À gauche : cabane de feuillages. Qui en a une reste enveloppé dans sa couverture.

Puissant remède à l'amnésie, cette image de la fin du festival, prise tête et appareil photo émergeant seuls de mon duvet dans la fraîcheur matinale, restera pour toujours à mes yeux une des plus chargées de souvenir de mon existence.


 

La musique avait cessé. Pourtant le soleil revint.

Il paraissait frapper plus fort encore et dire à tous que le moment des adieux était venu, dans un silence troublé lourd à l'oreille : on démontait les tours, et seul parvenait le piétinement sourd des road-managers sur le vaste plancher de la scène que, progressivement, l’on déshabillait, dans un terrible striptease de squelette. On parlait peu, on parlait bas. On eût dit que la foule, assombrie, désemparée, avait perdu sa voix, abattue par la fin de l'évènement - si grand qu'elle n'avait encore les mots pour évoquer la moindre de ses minutes. On s’attardait encore, roulant son duvet, bourrant son sac la tête ailleurs, espérant - qui sait - un dernier riff de guitare.

 

Alors, dans un dernier regard vers la vaste scène déshabillée qui avait tant donné, de partout, dans une marche lente et silencieuse, tête basse et dos courbé, l’on convergeait vers la sortie, piétinant à rebours le grillage inutile, l'esprit débordant du rêve, et les cheveux un peu plus longs*.

 

 

* Voir titre pour plus de précisions

 

THIS IS THE END

 

 

"This is the end,

my only friend,

the end"

 

(Jim Morrison, The Doors, titre "The end").

 

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On y était

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JCP    Jan. 2010 & Sept.- Oct. 2012 ; revu 2014, 2017, 2019

Image de première page première partie : prise en N&B et colorisée (original primé au concours FNAC-Canal+ pour les 40 ans du festival de Woodstock).

Images / pellicule N&B Kodak 125 ASA / 6X6 Rolleicord (non équipé de mesure lumière). Agrandisseur Meopta 6X6 / objectif Belar. Papier photo Agfa 13X18 cm. blanc brillant, glaceuse-sécheuse. Scanner Epson.

 

Scènes de tournage du film "La Michetonneuse" sur le site du festival avec François Jouffa (coscénariste du film) et Sylvie Jouffa (à gauche). A droite : Nadine Bernett et François Jouffa.

Précisions aimablement transmises par F. Jouffa lui-même (septembre 2022).

 


 

 

 

 

 

 

 

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Davantage d'images rock sur ce même festival et sur le début des années 70 :

http://paroledemusique.canalblog.com/archives/2012/10/04/16542405.html

 

Une des rares images trouvées sur le net, issue d'un article dans "La Provence" :

https://www.laprovence.com/article/sorties-loisirs/4061550/saint-pons-le-premier-woodstock-a-la-francaise-qui-eut-lieu-aux-milles.html

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 Ci-dessus : peut-être "Triangle" démarrant le festival le premier jour...

 

Une fan reprend mes images et me montre tenant l'affiche... :

http://www.lucyintheweb.net/lucy/forum/viewtopic.php?t=7169

 

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VIDÉO DU FESTIVAL (merci à l'I.N.A.):

 

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Lien plus bas (sous ce texte) : vidéo sur les moeurs conservatrices-castratrices-fascisantes et anti-jeunes de l'époque (interview des Aixois) : édifiant !, voire impensable, et pourtant il y a 50 ans seulement !

On peut comprendre l'ampleur et l'âpreté du combat mené par toute (du moins une bonne partie) de la jeunesse contre le dangereux esprit "adulte" incroyablement rétrograde. L'auteur de ces lignes dut mener ce combat, figurant lui-même parmi les premiers à vouloir mener sa vie à sa guise, simplement LIBRE et HEUREUX, deux mots qui n'entraient pas (y entrent-ils aujourd'hui ?) dans le vocabulaire de notre société où le consumérisme qui allait ravager la planète pointait déjà.

John Lennon :

 

"Quand je suis allé à l'école, ils m'ont demandé ce que je voulais être quand je serais grand.

 

J'ai répondu "Heureux".

 

Ils m'ont dit que je n'avais pas compris la question ;

j'ai répondu qu'ils n'avaient pas compris la vie."

 

 

LA VIDÉO DE LA HONTE :

https://www.ina.fr/video/CAF91056470

 

 

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REMERCIEMENTS

 

 aux personnes qui, de près, de loin, ou même sans le savoir, ont contribué à la rédaction du texte final :

 

Lisak, Sonia, Imago, Morata, Edmée de Xhavée, Denis Chollet (qui inséra trois de mes images dans son ouvrage "Nos années de poudre ça n'a pas traîné"),, Cold Blue, Daria, Martine (pour ses mots), Old Nut, Johanna Amar (pour nos échanges lors de la rédaction de son mémoire), Didier Thibault (Bassiste et leader de MGP pour son aide), Arthur Cerf (rédacteur à « Snatch Magazine »), Philippe Andrieu (pour son aide et la transmission gracieuse de l’enregistrement original de Léonard Cohen), Popallthedays, Wilfrid (pour ses infos), Ronan, Pat, MGP, Ditibo, Les Cafards, Logan31, Chantsongs.

Remerciements à Gilles Pidard (Cinéma et Musiques, université Paris Diderot-Paris 7).

 

Site Philippe Andrieu :

 

http://philippe.andrieu.free.fr/concerts/19700801/002-19700801-colosseum-johnny-winter-pete-brown.php

 

Remerciements à « Lucyintheweb » qui récupéra mes images pour en faire un article sur son blog personnel, affichant même, sans le savoir, mon propre portrait plein écran :

 

http://www.lucyintheweb.net/lucy/forum/viewtopic.php?t=7169

 

Autre utilisation des mêmes images sur facebook :

 

https://www.facebook.com/lesinstantsdete/posts/2701936169840092?comment_id=2709122655788110

 

Moving Gelatine Plates :

 

http://rock6070.e-monsite.com/pages/blues-et-rock-en-france/moving-gelatine-plates.html

 

Johanna Amar est diplômée d’un master de recherche en histoire culturelle et sociale à l’université de Versailles Saint-Quentin-en-Yvelines. Elle est rattachée au laboratoire du Centre d’Histoire Culturelle des Sociétés Contemporaines. Son mémoire porte sur les « Premiers festivals de musique pop en France en 1970 » sous la direction d’Anaïs Fléchet :

 

https://dumas.ccsd.cnrs.fr/dumas-01872518/document

 

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Joseph Kessel était présent au festival de Biot dit "Popanalia" quelques jours plus tard (nous y étions aussi). Ce fut un échec retentissant, la foule ayant brisé toute barricade. Seule Joan Baez s'y produisit (image suivante)

 

 

 

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Aspect de notre campement à Biot, où nous pûmes voir Joan Baez

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JCP, 11/2019

 

 

 

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7 décembre 2019

Sinueux chemin (1074)

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                                                                                                                                                                                 Image : X

 

Sinueux chemin

 

Ruelles de l’amour qui n’avez rectitude

Qu’à vos tracés naissants, fragile certitude

D’architecte raté, conception ignorant

Que toute herbe nouvelle sèchera sous le vent !

           

JCP Octobre 2019 ("Quatrains")

30 novembre 2019

Citation : Mikhaïl Gorbatchev

 

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Une histoIre brève dite par Mikhaïl Gorbatchev, et citée par Pierre Rabhi mercredi 27 novembre 2019 à "La Grande Librairie"

 

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LES DEUX PLANÈTES

 

Deux planètes se rencontrent.

La première dit à l’autre :

- Comment vas-tu ?... je te trouve un peu chiffonnée…

- Pas très bien en ce moment. J’ai attrapé l’humanité.

- Ah, je te plains, j’ai eu cette maladie autrefois. Mais j’en suis enfin guérie, et je vais beaucoup mieux !

 

Mikhaïl Gorbatchev

 

29 novembre 2019

Réflexions zen

 

 

DU CÔTÉ DU ZEN

 

 

 

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Le moment présent, cet inconnu

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La clé de contact

ou : À la recherche du calme intérieur

 

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                                Cet article s’adresse aux personnes curieuses de la nature humaine, curieuses d’elles-mêmes et se questionnant quant à ce qui pourrait bien se passer au sein mystérieux de ce qu’on nomme mental ou esprit, alertées par certains moments de la vie où, justement, on voudrait bien qu’il s’y passe autre chose, « là-dedans », voire, ce serait inespéré, rien de notable : le calme intérieur peut-être… ?

 

« L’esprit vole de sottise en sottise comme l’oiseau vole de branche en branche. »

Paul Valéry

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EXERCICE

 

                                 Propre à mettre en évidence un moment présent tout à fait banal de notre vie quotidienne, voici un petit exercice de vie intérieure :

Lorsque vous prenez votre auto, une fois assis.e au volant - bien assis.e -, prenez le temps, introduisant la clé de contact et la tournant pour démarrer, de vous demander :

« - Qui tourne la clé ? »

 

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                              Bien sûr, vous ne vous êtes jamais posé cette question saugrenue et vous vous dites : - A quoi bon, qui d’autre que moi la tournerait, c’est ridicule !

Essayez pourtant, et vous vivrez (peut-être) un moment de votre vie pour ainsi dire jamais vécu. Restez concentré sur tout ce qui survient, à l’extérieur et à l’intérieur de vous-même, et réfléchissez à la question le plus sérieusement du monde tout en tournant la clé pour démarrer, une fois votre souffle apaisé.

Peut-être y découvrirez-vous des réponses - si vous aviez en vous des questions.

Sauf probablement les premières fois, vous n’avez jamais vécu cet instant, d’aucune façon, réfléchissez.

 

Ou abandonnez simplement l’exercice s’il vous ennuie ou si vous n’y adhérez pas.

 

Si toutefois vous étiez encore présent.e, les yeux sur ces lignes : Vous n’avez tout simplement pas tourné la clé depuis des années.

Vous avez été, un petit nombre de fois, attentif.ve aux premiers tours du moteur. Et encore, seulement lorsqu’il démarrait mal - ce qui se fait rare aujourd’hui.

Vous avez effacé de votre vie ces moments où vous tourniez la clé, vous ne les avez pas vécus. Et n’en avez pas conservé le souvenir.

À votre insu, votre mental vous en a éloigné.e. C’est lui le coupable.

 

Vous n’en avez rien à faire : en tournant la clé vous vous projetez déjà, abandonné.e à votre mental, sur les embarras de la circulation, sur un parking, celui du supermarché, de votre lieu de travail ou, plus loin encore dans le futur, sur ce que vous ferez une fois le parcours achevé et le véhicule abandonné. Ou bien vous ne pensez à rien de tout ça, mais seulement à la somme de choses plaisantes ou déplaisantes qui vous occuperont, dans deux minutes, deux heures, deux jours, deux mois…

Vivriez-vous donc exclusivement dans le futur, dans une sorte de non-vie virtuelle ?

Oublieriez-vous de vivre, que le présent soit ainsi écarté de votre vie ?

 

De la même façon, vous négligez inconsciemment de nombreux moments de votre vie et ne les vivez pas.

Et nous faisons à peu près toutes & tous de même.

 

Que faire de ceci ? Allons-nous perdre notre temps à ces idioties, l’heure tourne et… vous l’avez dit, l’heure tourne : vous venez de perdre une minute à cette lecture inutile. Alors que si vous réfléchissez un peu, vous vous rendrez compte que vous venez au contraire de gagner cette même durée dans votre vraie vie, celle qui se vit au présent, ici même, en ce moment, tout en lisant ces lignes qui vous révoltent ou vous interpellent.

Car rien ne se vit ailleurs qu’au moment présent.

Le passé est une suite d’anciens moments présents.

Le futur est la projection imaginée de futurs moments présents qui n’auront peut-être pas lieu.

 

Pourtant, ça n’est pas ce que vous faites, ce qui vous occupe, c’est le passé que vous parcourez, et le futur où vous vous projetez.

Cet incessant aller-retour passé-futur et inversement occupe la quasi-totalité de votre vie, et peut se montrer contraignant - voire épuisant. Peut-être avez-vous déjà remarqué cela sans y réfléchir outre mesure (notre culture, comme les médias, ne nous y incitent pas).

Or ni passé ni futur n’ont de réalité, il faut bien en convenir.

Vous oubliez de vivre votre vie, car vous ne vivez pas au présent.

Et même si vous vivez un moment heureux, vous ignorez qu’il l’est, car votre mental vous entraîne déjà dans un futur imaginaire pour tenter d’y en trouver d’autres - plus intenses si possible. C’est demain que vous vous direz « - Hier c’était bien ». Avec le regret de ne pas avoir profité plus de ce moment passé trop vite - présent hier.

 

Vous répondez déjà, conforté.e dans votre vision qui est celle de tout-un-chacun, que sans le passé vous ne seriez rien : éducation, savoir acquis, physique longuement modelé par le sport, etc… critères qui font aujourd’hui ce que vous êtes (les manifestations de l’ego ne sont pas loin), et que vous avez de remarquables projets qui, eux, sont tournés vers l’avenir, un avenir radieux - espéré radieux pour le moins.

Certes il convient de réfléchir à ce que l’on fera demain ou dans quelques minutes, planifier un minimum sa vie a son importance et peut même se montrer vital.

Il n’est cependant pas nécessaire de laisser son mental s’emplir durablement du passé, avec son lot de regrets, d’erreurs commises, de reproches que l’on se fait,  de ses réussites, de ses moments heureux, ni de ses seuls projets, souvent vecteurs de soucis, de tracas, de craintes, de peurs, d’espoir de bonheur et autres sentiments injustifiés :

Le passé est un cadavre que l’on traîne plus ou moins volontiers. Est-on certain du futur ?

Le mental est un outil puissant qui n’a pas besoin de ressasser, il trouvera toujours la solution confronté à la situation. Pourquoi nous fait-il cela ?

 

Alors que peut-être, au lieu de laisser votre mental vagabonder vers des inutilités (trop souvent stressantes), vous pourriez passer quelques secondes de sérénité à tourner la clé en pleine conscience, corps apaisé, mental vide, faisant corps dans le silence avec la clé que vous tournez.

Ressentir sa matière, sa forme, sa douceur, sa rugosité, la froideur de son métal, sans penser à quoi que ce soit, concentré.e uniquement sur le ressenti de votre main, de vos doigts, l’écoute des divers déclics métalliques, du bruit du démarreur suivi de celui du moteur. Ceci sans avoir recours à la pensée qui veut analyser ces informations, les classer, les comparer avec d’autres, enfouies dans le passé où déjà le mental vous attire, à moins qu’il ne vous ait déjà replongé.e dans le futur, loin de la clé, le mental est tellement rusé que vous ne vous en êtes même pas aperçu.e.

Se concentrer exclusivement sur le ressenti (par l’intermédiaire des sens) a la faculté de vider le mental. Et d’être soi-même, non son esclave.

Le mental vidé de la pensée, ne serait-ce qu’un instant, nous offre un aperçu du bonheur sans cause.

Ce bonheur-là est gratuit (mauvais pour la consommation et la croissance, aussi les médias ne nous en parlent pas).

Qu’est–ce qu’une pincée de secondes de bonheur, c’est ridicule et insuffisant dites-vous. Certes. Mais nous pouvons inviter d’autres moments de bonheur tout au long de notre journée, et former notre mental plutôt à les ressentir qu’à nous harceler de pensées que nous ne choisissons pas. Cesser ainsi d’être l’esclave permanent de notre mental.

 

Les moments où nous avons été le plus heureux,se dans notre vie sont ceux où nous ne pensions pas, où nous ne parlions pas non plus. Réfléchissez-y, vous avez des réponses en vous.

Il ne s’agit ni du plaisir ni de la joie, états fugitifs, mais du bonheur sans cause apparente, un état que nous pouvons puiser à l’intérieur de nous, en nous connectant sur le moment présent.

 

Tournez donc la clé - si vous le pouvez, car la pleine conscience de ce simple geste est un exercice demandant beaucoup de concentration. La preuve en est que vous le découvrez. Maintenant.

Et si toutefois, en tournant cette clé, vous aviez un aperçu, non seulement de ce qu’est le moment présent, mais aussi de la paix intérieure qu’il contient et qu’il est prêt à vous offrir, pourquoi ne pas persister, de temps à autre, à « tourner » d’autres moments présents à votre avantage, pour retrouver cette paix intérieure que l’on ne nous permet plus ?

 

Pour celles & ceux qui persisteraient encore à lire ces « naïvetés utopistes » :

 

Lorsque vous marchez seul.e (dans la rue, sur un chemin quelconque, du parking au lieu de travail ou poussant le chariot du supermarché alors que vous êtes « pressé.e », etc…), demandez-vous :

« - Qui marche ? »

Suivez alors le même raisonnement que pour la clé de contact, le mental, le corps - et la respiration - uniquement dédiés à la marche :

Avez-vous déjà marché en sachant que vous marchiez ?

Avez-vous ressenti le contact de votre pied avec le sol, le geste décomposé de la marche, les sensations de vos jambes en action, suivi de bout en bout votre respiration et ses étapes ?

Peut-être n’avez-vous jamais marché en pleine conscience, ou bien très rarement : par exemple si marcher présente un risque, dans la boue, la neige, la glace, les sables mouvants, l’escalier raide, ou, pour une raison quelconque, de façon silencieuse.

Dans ces situations-là vous ne pensiez-pas, vous marchiez : vous étiez uniquement concentré.e sur le processus de la marche (dont votre sécurité ou même votre vie pouvait dépendre).

Peut-être, en dehors de ces situations, n’avez-vous jamais marché…

Essayez donc de savoir que vous marchez (en marchant un peu plus lentement qu’à l’accoutumée, prenez le temps, le temps vous appartient, réappropriez-vous-le !).

Constatez-vous quelque chose de nouveau en vous ?

- Vous seul, vous seule détenez la réponse.

 

Ces exercices pourraient être pour vous le départ d’une nouvelle vie - plus sereine probablement. Peut-être même plus heureuse. De nombreuses personnes dans le monde ont déjà fait cette démarche avec succès.

 

Mais vous n’en ferez rien, vous êtes tellement bien, à l’abri du présent, à l’abri de la vie dans cette prison dorée régie par le temps : passé-futur-passé-futur-passé-futur-passé-futur… / Tic-tac-tic-tac-tic-tac-tic-tac…

Installez-vous donc un peu plus souvent entre le tic et le tac, là où réside la vie, hors du temps : au présent.

 

Et… la vaisselle ?

Et… la cuisine, manger ?

Et… faire la queue ?

Et… enfiler ses chaussettes ?

Et… préparer le thé ?

Et… le jardinage ?

Et… ?

Et… ça aussi ?

 

 

C’est idiot n’est-ce pas, qui va perdre son temps à ces enfantillages ?...

 

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Si, malgré le soin approrté à la rédaction, omission coupable aujourd’hui, hautement punie des Néoféministes, quelques « .e » faisaient défaut, en voici à discrétion : .e .e .e .e .e .e .e .e .e .e .e .e .e .e .e     .

 

JCP Sept-Nov/2019

D’après la phrase citée en début de texte et relevée dans la préface de l’ouvrage « Esprit guide » de Karlfried Graf Dürckheim, Éd. Albin Michel.

 

CONNAÎTRE LA MÉDITATION ZEN :

(Ces ouvrages très connus ont été tirés à des millions d'exemplaires)

 

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25 novembre 2019

Germes d'étoiles (0899)

 

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                                                                                                               Hermine David Le Labour

 

Germes d’étoiles

 

                             A voir enfanter la pierre dans les vastes labours, se repousse pour un temps la stérilité du rêve, et les yeux s’ouvrent sur un champ d’étoiles mortes que le soc rappelle à la vie.

                    Impuissante, la gestation inachevée en appelle à la main de l’homme, et le danger d’un rebours du temps se fait sentir : par la terre éventrée aurait-on corrompu les lois de l’univers ?

                    Des trônes écrasés, des marbres brisés jalonnent le sillon ; le cheval fourbu s’éloigne tête basse, et l’homme apeuré s’enfuit.

                   Persiste encore l’espoir d’une pluie céleste qui saurait, dans ce ciel bas, fertiliser le sillon et engendrer la vie nouvelle. Pourtant rien ne paraît encore.

                       Il faudra vivre encore, et longuement mourir dans l’attente incertaine.

 

 

 JCP 11/04 2018 - 11/2019 (Recueil "Monde Neuf")

21 novembre 2019

Koan : Quelle est la richesse du moment présent ?

 

DU CÔTÉ DU ZEN

 

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                                                                  ◄ ►

 

                                       Rien ne se monnaie

                                       de l’impalpable richesse

                                       du moment présent

 

                                       mais quiconque sait la voir

                                       est riche de l’or du monde

 

                                                      ►◄

 

Inspiré par le koan* cité en titre et écrit sous la forme tanka**.

JCP  Octobre 2019

* KOAN : courte phrase ou brève anecdote paraissant absurde ou paradoxale utilisée dans certaines écoles du bouddhisme zen comme objet de méditation.

** Tanka : forme de poésie japonaise dont la métrique est 5-7-5 + 7-7.

18 novembre 2019

Citation : Philippe Geluck, "Le Chat"

 

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