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La Chanson Grise

22 décembre 2016

Lui aussi (koan)

Essai de Koans* Zen...

 

 

1

 

Étant né de mère stérile,

il n'avait d'autre existence

que fourrure au dos des tortues ;

et bien qu'on l'appelât Non-Né,

vint le jour de sa mort.

 

 

 

 

----------------------------------------------------------------

 

2

 

Sa mère n'ayant pas connu son père,

il ne put voir le jour

- et le déplora toute sa vie.

 

 

JCP 12 07 16

 

* KOAN : texte bref en apparence insoluble ou absurde, proposé par le maître au disciple Zen dans le but de l'interpeller tout en le poussant à la réflexion. (Surtout propres au bouddhisme zen Rinzaï).

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13 juillet 2016

Senteurs de musée

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                                   Comme chaque soir, le grand musée refermait ses portes et les vastes salles, abandonnées pour la nuit, retrouvaient leur silence intime. On n'entendait plus que le pas lointain du gardien de nuit, qui arpentait le dédale infini d'escaliers, de couloirs et de pièces de toutes tailles et proportions, en métronome las.

Insomniaque de profession, l'homme répétait toutes ses nuits de labeur ce scénario bien rodé, en ces lieux qu'éclairaient de faibles veilleuses au ras du sol, juste suffisantes pour qu'il puisse voir le bout de ses pieds sur les carrelages ou les planchers portant la trace de tant de semelles de visiteurs, caresse rude au fil des jours, au fil des ans.

Outre les senteurs de vieux bois verni, de la poussière recouvrant les grands squelettes fossilisés, des panoplies, des tissus, vêtements et frocs des statues de cire craquelées, l'odorat le moins affûté perçoit dans tout musée l'odeur, imperceptible et pourtant bien présente, de la mort : cela sent le chrysanthème dans ces espaces, ces vitrines à pointes de flèches, à pierre taillée, à vide-pommes comme à matriochkas, ces alignements sans fin de bidules au nom barbare - et d'animaux de toute espèce que l'homme sacrifia, sans scrupule, à l'autel du soi-disant savoir universel qu'il veut indispensable.

Savoir dérisoire où l'homme se voit omniscient, et se pose en maître.

Il n'est pourtant là qu'un prédateur prompt à tuer, vider, empailler, naturaliser, ranger étiqueter qui, tel le vice-amiral au combat ne montre de compassion pour le poisson torpillé, demeure ignorant du véritable psychisme du monde animal, de ses joies, de ses souffrances, et de sa connaissance innée de la Vie, trop souvent inaccessible à l'homme en sa substance profonde, en son essence vraie.

Et c'est au beau milieu du calme silencieux de la nuit, au sein de cet univers où toute vie - autre qu'humaine - est bannie, que s'élèvent sans vergogne d'autres senteurs : l'homme de chair, d'os et de sang, l'homme vivant parmi les animaux morts, le geste lent, le souffle à peine impatient, cesse un moment sa ronde et prend, tiré de son sac, son repas devant des milliers d'yeux de verre au regard figé, devant des babines retroussées au croc aigu, et devant des museaux aux narines depuis si longtemps éteintes qu'elles ne sauront rien des senteurs du bœuf mariné, du camembert ou de la merguez, dont l'homme fait son délice solitaire.

 

 

JCP 11 07 16 Pour Les Impromptus Littéraires ; sujet : utiliser ces mots : bidule, vide-pomme, chrysanthème, matriochka, merguez, froc, vice-amiral, pieds)

4 juin 2016

Pensée active

 

Si le seul désir charnel pouvait enfanter,

Que de naissances, que de naissances...

Si la seule pensée de haine pouvait tuer,

Que de morts, que de morts...

 

Lequel, de l'amour ou de la haine,

triompherait alors ?...

 

 

JCP 20 05 16

5 avril 2016

0755 Au salon

 

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Au salon

 

Le salon dormait dans la pénombre ;

Et, des persiennes entrebâillées,

Un friselis de soleil et d'ombre

Courait ses entrechats débraillés.

 

Sous le regard d'un très vieux portrait,

Sans cesse un gros frigo ronronnait,

Et l'on sentait à sa pompe lasse

Qu'il peinait à faire de la glace.

 

Les piaillements de quelques moineaux,

Venus des platanes de la place,

Troublaient à peine ce grand repos,

Où languissaient quelques plantes grasses ;

 

En  cette journée aux heures lentes,

Les espaces de silence lourd

Ne révélaient pas de vaine attente

Dans la pièce chaude comme un four.

 

Des relents de tabac, de cuisine,

Et de l'eau laissée dans la bassine

Montraient que l'on vivait en ces lieux,

Mais rien ne s'agitait sous les yeux.

 

Seul le mince filet de fumée

Qui du large fauteuil s'élevait

Trahissait sa présence, et prouvait

Que l'Homme Invisible aimait fumer.

 

JCP  04 2016, pour Les Impromptus Littéraires (utiliser la première ligne comme incipit)

15 mars 2016

451 Dictatorat

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Dictatorat

 

Seigneur du vaste égout dans sa livrée coquette,

Un rat de poil brillant et de mine replète

Arpentait ses couloirs, et d’un air suffisant

Reniflait les effluves de ces flots odorants.

 

- Me voici parvenu au faîte de ma gloire,

Se disait-il radieux ; le manger et le boire

Servis à satiété par des sujets soumis,

Et ma couche habitée de gentilles amies.

Bienheureux comme moi, sans mentir il n’est guère :

J’ai bien fait c’est certain de mener cette guerre.

Car malgré la souffrance et la dévastation,

Mon peuple je le crois, est en admiration

Devant le personnage auguste et vénérable,

Qui mérite en effet ce sort des plus enviables.

 

- Le sang versé s’oublie, demeure le pouvoir.

Mon peuple policé reste sous l’étouffoir,

Et devra pour toujours veiller à mon bien-être,

Acclamant mes discours courbé sous ma fenêtre.

 

Mais porté par les eaux, un murmure lointain

Que grandissaient les murs parvint à son oreille...

- C’est aujourd’hui ma fête, se dit le souverain :

Mon peuple réuni, d’une humeur sans pareille,

N’attend que mon retour pour les grandes agapes,

Et il pressa le pas plus heureux que le Pape,

Riant de ses sujets, qu’il se félicitait

D’avoir comme baudets assujettis à souhait.

 

Mais la rumeur pourtant, qui grandissait sans cesse

En clameur menaçante, n'avait rien de joyeux ;

Sans affoler pourtant ce Sire prétentieux,

Qui restait convaincu d’un élan de liesse.

 

Il n’eut le temps de fuir qu’il était piétiné,

Roué de coups percé et mille fois tué.

Grand nombre de despotes souvent ainsi finissent,

Croyant de leur pouvoir toujours boire au calice.

 

 

27 07 11 - revu 03 2016

Et sur Les Impromptus Littéraires :

http://impromptuslitteraires.blogspot.fr/2016/03/jcp-animal.html

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2 mars 2016

A la poupe

           

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A la poupe

 

                                  Un grand déséquilibre, je devais le reconnaître, régnait en mon esprit troublé par les étranges manifestations de la nuit.

Tout a commencé lorsque, lassé du luxe tapageur et stérile d'une de ces innombrables soirées festives qui se donnaient à bord afin d'égayer la longue traversée, un profond désir de soulager ma respiration de la fumée du tabac, mon corps et mon esprit de l'alcool et de l'impérieuse musique de danse aux vaines gesticulations se fit ressentir. Je débouchai sur la coursive supérieure transfiguré par la douceur de la nuit, et par la sérénité du territoire sans fin où le puissant transatlantique creusait son écumeux sillage.

Je rejoignis la poupe au gaillard arrière et m'accoudai au bastingage, partie extrême de cette forteresse en mouvement, observatoire privilégié dominant l'immense plaine liquide sur laquelle une douce brise éveillait sans bruit de faibles sillons. A cette heure avancée de la nuit, seul un couple enlacé, indifférent au spectacle du ciel et des eaux, se tenait à l'écart, adossé contre la cloison du bâtiment.

La pleine lune, qui soulignait les reliefs du bâtiment de ses tons argentés, laissait pénétrer le regard au sein des ombres légères et la voûte céleste, d'une pureté inouïe, laissait paraître, méconnues dans notre hémisphère, la Croix du sud et la vaste constellation du Centaure. Les yeux mi-clos et l'esprit libéré de la pensée compulsive, perdu dans la contemplation, je goûtais ce présent du cosmos infini lorsque cela se produisit :

Spectacle renouvelé sous les rayons de la lune, ourlé de ses cordons d'écume, le sillage du paquebot qui s'élargissait apaisé au lointain parut soudainement éclaircir sa surface aplanie ; on eût dit qu'un astre, tombé tout au fond de ces eaux, en éclairait cette part infime et elle seule. La lumière venue des profondeurs s'intensifiait à chaque minute, et c'est bientôt que je pus voir, incrédule, à travers l'inouïe transparence des eaux monter des abysses une masse sombre, de forme allongée. Bientôt, un mât, puis deux, puis trois, équipés de leurs vergues et toutes voiles carguées crevèrent tour à tour la surface ; enfin, une longue nef de bois, ruisselante de toutes parts, émergea dans le sillage clair, alors que s'éteignait la lumière venue des eaux...

"Vaisseau fantôme" fut la première pensée qui me traversa l'esprit lorsque les voiles brunes se déployèrent d'un seul mouvement - sans présence humaine visible ! Le bateau, taillé pour la haute mer et qui prenait déjà le vent à toute toile plein largue, ne laissait aucun sillage et courait aussi vite que notre paquebot, alors que seule une légère brise murmurait à peine à mes oreilles.

Les yeux écarquillés, je demeurai un long moment figé, inerte, vidé de la pensée, puis me retournai lentement, en recherche d'autres témoins de la fantastique apparition : les amoureux avaient rejoint leur cabine, et le vieux monsieur qui m'avait salué tout à l'heure avait dû faire de même en cette fin de nuit.

Me retournant, je vis alors le trois mâts virer de bord, reprendre le vent et quitter notre sillage, faire route tribord amures, puis s'éloigner à une allure inconcevable sur le flot toujours vierge de sa trace. Il ne fut à mes yeux bientôt plus qu'un point à l'horizon, où paraissaient déjà les premières lueurs de l'aurore. J'étais donc le seul à l'avoir vu, et nul ne pourrait confirmer l'incroyable vision...

Effondré : jamais encore je n'avais ressenti le poids de telle solitude que celle de ne pouvoir partager le prodigieux, le  jamais vu avec aucun être vivant - et ceci à jamais.

Je rejoignis ma cabine les yeux hagards, tête basse et trébuchant, et ne retrouvai un certain équilibre que le lendemain soir, racontant par le menu mon aventure visuelle à un steward désabusé, qui ponctuait courtoisement mon récit de quelques "En effet monsieur" et de "Tout à fait monsieur", affairé derrière son bar - au delà du huitième whisky-glace, qui embrumait mon esprit de vapeurs salutaires.

De ce jour demeure au fond de moi une part de trouble et de confusion, qui s'éveille aux nuits calmes des bords de mer, lorsque la lune caresse le flot de ses reflets d'argent. C'est alors que, glissant sur les eaux sans les repousser, paraît encore à mes yeux le "Hollandais volant" aux voiles brunes, que manœuvre un équipage de spectres insaisissables et qui, dit-on, n'accoste que tous les sept ans, laissant alors son capitaine tenter de briser la malédiction qui le frappe pour l'éternité en recherchant, quête improbable, l'amour sans conditions de celle qui le suivrait sans espoir de retour.

 

 

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JCP 03 2016

Pour les Impromptus Littéraires

29 janvier 2016

Citation 1

Friedrich Nietzsche

"La connaissance est pour l'humanité un magnifique moyen de s'anéantir elle-même."

19 janvier 2016

Disparition de Michel Tournier le 18 janvier 2016

Avec Michel Tournier disparaît un de mes écrivains favoris, rejoignant le Panthéon des derniers géants de la littérature, ceux qu'on ne saura pas remplacer, tels, dans un autre registre, Julien Gracq, disparu un peu plus tôt, lui, le 22 décembre 2007.

Merci Michel Tournier, pour toutes ces heures de lecture d'un enrichissement enthousiaste que tu m'as si généreusement dispensées.

Je ne pourrai désormais que te relire.

- Tiens le coup, Jean...

JCP

7 décembre 2015

En el pecho

 

 

En el pecho

ou : héros d'un jour 

 

                            Né bilingue (occitan-français), j'ai toujours aimé les langues, mais c'est en espagnol où je brillais le plus, le pratiquant à toute occasion (Midi-Pyrénées, Occitanie aujourd'hui, oblige).

Remplaçante jeune, belle et pulpeuse de notre vieil encravaté-chapeauté-chauve de prof d'espagnol, dès son premier cours sa vue nous plongea tous dans l'émoi le plus vif, à un âge où les énergies tendent à se focaliser...

Désigné pour le jeu des questions-réponses celle-ci me demanda :

- ¿ Cuantas bombillas hay en el techo ? - "Combien d'ampoules y a-t-il au plafond ?".

Incapable hélas du moindre regard vers le plafond, tant il était figé sur sa poitrine idéale sise dans le déraisonnable moulé de son pull, c'est l'instinct qui me dicta :

- En el pecho hay dos bombillas. - "Sur la poitrine il y a deux ampoules" - immanquable facétie (en outre le plafond en comptait quatre) provoquant - cancres exceptés - l'hilarité générale.

Pecho / techo, une seule lettre pour autant d'effet, je me sentis rougir jusqu'à la pointe des cheveux, et vis que l'on pouvait remarquer de même une certaine coloration cutanée sur le joli visage de la jeune professeur, dont la voix se troublait.

Je fus vivement réprimandé pour le chahut et, n'osant répondre à mon allusion, celle-ci passa d'emblée à la question suivante, alors que les rires et les pouces levés vers moi s'apaisaient difficilement.

  

JCP 11-12 2015 Pour Les Impromptus Littéraires (Un enseignant qui vous a marqué)

2 décembre 2015

Les fesses du professeur

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Im. JCP

 

Les fesses du professeur

ou : (x² + y² - ax)² = a²(x² + y²)

 

                                 D'un physique inspirant le respect, l'homme était sévère et l'on se tenait tranquille au cours de mathématiques de Mr Pierre Delmas, dit cependant "Pierrot". Le cancre et le chahuteur, ignorant la voix du professeur ou y cherchant facétie demeuraient pareillement silencieux, et c'est à peine si l'on remarquait, ici où là, l'œil mi-clos ou l'esquisse de quelque grimace sur des visages prudents : on savait l'homme d'humeur prompte à punir. Égaré dans la projection spatiale comme dans l'intégrale, qui ne voulait écouter se tenait coi.

Mais qui, animé du désir de suivre pas à pas cette voix lente, grave et engageante pouvait voir, ébahi, se dresser lentement devant lui tout un monde neuf en construction, dont l'image grandissait autant à la surface du tableau noir, qu'elle emplissait l'esprit des merveilles d'exactitude froide - et pourtant grisantes - de la géométrie, qu'elle fût plane ou dans l'espace.

Le discours prenait alors un tour lyrique. Sans jamais s'essouffler, la voix montait mille échafaudages de droites infinies, de segments définis, de coniques aux courbes avantageuses appelant de caressantes voluptés, d'incroyables points de concours où l'angle aigu tolérait la répugnante promiscuité de plus obtus que lui, dans la paix sans bornes des espaces tridimensionnels.

Nées de foyers si chauds qu'elles devaient les fuir, hyperboles, spirales et paraboles tendaient leurs bras sans fin vers les lointains indicibles alors que, de plus modeste condition, cercles, ellipses et ovoïdes, parallélépipèdes ou sphères se laissaient mieux appréhender par le regard - comme par l'imaginaire.

Mais il fallait voir comme les "fesses du lait" (telles qu'on les voit paraître à la surface du lait dans la casserole), et que de pudiques mathématiciens nommèrent "cardioïde" déclenchait, - instant trivial autorisé -, une déferlante de rire éveillant jusqu'au cancre qui, regrettant de n'avoir pas suivi, consentait à s'instruire de la réjouissante courbe auprès de camarades plus studieux, Pierrot ajoutant alors que, - nom de dieu ! -, il fallait bien nommer un cul un cul !

Et c'est à regret qu'une sonnerie assassine ramenait à son monde, celui du temps, un moment oublié alors que les restes du rêve tracé s'évanouissaient sous les coups du tampon effaceur - quand à notre insu nous étions déjà investis d'une part supplémentaire de ce merveilleux savoir qu'avait su nous insuffler Mr. Delmas, dit "Pierrot".

 

JCP 11-12 2015 Pour Les Impromptus Littéraires (Un enseignant qui vous a marqué)

 

8 novembre 2015

Les yeux fermés

 

Les yeux fermés 

 

Comme une houle sonore à l'invisible flot

dont le flux et le reflux

semblent porter tour à tour

l'oreille et le corps vers de vagues lointains,

la terrasse du grand café

respire au vent du large

des grèves citadines.

 

 

JCP 08 11 15  07 11 15 par une chaude soirée de novembre, au Florida (Toulouse)

30 septembre 2015

Das Auto !

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Das Auto !*

 

 

5 Avril 1975, journal télévisé de 20 H., TF1 :

"- La crise est là, certes, les prix s'envolent, le prix du baril de pétrole flambe mais, heureusement, un nouveau type de moteur, jusqu'ici réservé aux poids lourds et aux navires de haute mer est enfin disponible sur nos automobiles : le moteur diesel.

Cette motorisation révolutionnaire, venue à point nommé en ces temps difficiles, réunit en effet d'immenses avantages : faible coût du carburant et consommation basse, puissance à bas régime pour une usure mécanique réduite, ajoutés au taux de pollution le plus bas jamais obtenu sur un moteur automobile.

L'avenir est dans le diesel : luttons tous contre la crise en roulant diesel !"

 

23 Septembre 2013, journal de 20 heures, France 2 :

"- La vérité sur le diesel nous est enfin révélée : ces moteurs affichent - les derniers tests sont accablants -, un taux de pollution inacceptable pour l'homme et l'environnement.

Mais, fort heureusement, les constructeurs l'affirment et c'est une excellente nouvelle, les filtres à particules qui équipent les nouveaux modèles réduisent à néant ce qui n'était qu'un défaut de conception : Nous pouvons continuer à rouler - économiquement et proprement - avec les nouveaux véhicules diesel !"

  

18 Avril 2015, info en continu, BFMTV :

"- La vérité sur le diesel nous est enfin révélée : les filtres à particules ne tiennent pas leurs promesses : des tests d'un type nouveau montrent clairement qu'ils sont inopérants.

Mais les constructeurs, qui ne sont pas restés inactifs, nous proposent de nouvelles motorisations essence qui, elles, offrent enfin toutes les garanties.

Il est donc de notre devoir envers la planète et les générations futures de rouler avec ces véhicules de dernière génération qui - on nous l'assure -, sont les plus économiques et les moins polluants jamais conçus !"

 

Ajouté en janvier 2019 : les filtres à particules ont fait de tels progrès que le moteur diesel est incontestablement devenu le moins polluant. Cependant, ces progrès sont tus soigneusement, et les constructeurs ne s'en plaignent pas, car les gogos, convaincus du contraire, se débarrrassent de leur diesel au profit d'une auto flambant neuve à essence dans le souci d'être "dans le coup" et d'en mettre plein la vue à son prochain.

Comme on fait, singeant les USA et soutenus par les médias, d'excellents et dociles moutons dans notre pays ! À quand la lobotomie complète et le "gogo-conso" absolu ?

Décembre 2020 : Ne parlons pas de l'engouement provoqué par les médias pour la voiture électrique, environ deux fois plus polluante pour la planète qu'essence et diesel, chose qu'on nous cache avec le plus grand soin ! Sans parler non plus du redoutable recyclage des millards de batteries dont on ne sait quoi faire, et des populations soumises au cancer et à l'exode par l'expoitation des matériaux rares... La messe est dite.

 

* "Das Auto" : slogan publicitaire adopté par "certain" constructeur allemand

 

  

JCP 09 15 Pour les Impromptus Littéraires (sujet : "Un beau salopard")

12 septembre 2015

Maudite parure

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Maudite parure

 

1

                                          Tout au fond de la vaste remise au sol de terre battue, une moue à la lèvre, l'antiquaire évaluait le mobilier qu'il venait d'acquérir pour un coup de chapeau, meubles misérables pour la plupart, d'où se détachait pourtant la commode aux poignées argentées, sans style, mais qui avait motivé son obole à des héritiers ignoblement pressés.

Il en retira les deux tiroirs supérieurs alors que celui du bas, demeurant bloqué, montrait par les ouvertures un empilage de vieux linge jauni, qu'il extirpa pour découvrir trois banals portraits de femmes montés en sous-verre, les deux premiers notablement anciens, le troisième plutôt récent. Il les déposa verticalement sur le dessus de la commode, adossés au mur, les observa un moment et s'en fut porter la brassée de sous-vêtements féminins - dont le contact soyeux l'émut un moment et ralentit son pas - au container des déchets du fond de la pièce.

 

 

2

A peine l'homme en eut-il laissé retomber le grand couvercle, qu'il crut discerner des chuchotements paraissant venir de l'autre bout de la remise déserte.

Suspectant des indésirables à cette heure tardive, voire des cambrioleurs, celui-ci s'avança de quelques pas silencieux pour se dissimuler derrière une armoire. On ne voyait rien ni personne mais on pouvait entendre, tout à fait distinctement maintenant, les voix de plusieurs femmes en grande conversation sur la mode, la parure et la beauté, alors que la source de ces voix semblait se confondre avec la nouvelle commode - auprès de laquelle on ne constatait aucune présence...

Peu porté sur les croyances et les voix tombées du ciel, l'antiquaire s'approcha sans bruit du meuble où trônaient les trois portraits, et ce qu'il entendit fit chanceler ses incrédulités comme ses jambes :

- Pour moi, amies très chères, déclarait la voix jaillie du premier portrait sans doute plus que séculaire, tout est dans le chapeau - où l'artiste amoncelle pour nous mille mignardises -, et que l'on élève en miroir aux alouettes, que dis-je, en phare rayonnant sur l'océan des hommes, phare qui retourne autant la jalousie des rivales que l'œil échauffé du galant : rien ne vaut croyez-moi le chapeau, qui flatte notre image à l'esprit masculin - si facile à tromper comme vous le savez.

Et, il me faut le dire, mariée contre mon gré à un gros imbécile rougeaud bien que fortuné, je ne dénombre plus les hommages rendus à mes chapeaux, prétexte pour en faire sans tarder de plus intimes à ma propre personne.

Je tire voyez-vous mes amants - pour ainsi dire - du chapeau.

Le chapeau c'est épatant ! 

- Ho la mémé, fit la seconde, blonde vaporeuse hollywoodienne, un chapeau, douze jupons enfilés l'un sur l'autre et ta triste chemise boutonnée ras du cou, c'est les cagots que tu vas piéger - et encore si ces tartuffes-là s'en vont pas après la messe retrouver quelque danseuse incognito !

Tu te goures, le gugus, qu'est-ce qu'y veut ? - De la blonde à cheveux longs, de la cuisse résillée, un bon petit joufflu à la fesse et du mammaire en expo ; tout ça noyé au patchouli. Je vais te dire, t'y connais que dalle aux mecs, y a pas de sexe au chapeau, ça se saurait ; ouais ! 

- Ben... fit la troisième, brunette effrontée dégraissée jusqu'à l'os aux régimes minceur, moi, j'ai pas de recette comme vous, là... avec les hommes je reste nature : pantalon de cuir noir bien moulant (ça les rend fous, ça), bustier juste assez décolleté pour pas faire pute, cheveu ni trop long ni trop blond, coiffure soignée mais décontract', le bijou sobre, un peu de trompe-couillon aux yeux - c'est tout !

Et pour moi, ça marche tout à fait bien, je les secoue un peu de la parole et du geste, ils aiment ça je vous le dis, pas besoin d'artifices - si, d'accord, un parfum plutôt classe mais discret - moi c'est Chanel - voilà tout.

 

  

3

Soufflé par le prodige, Édouard l'antiquaire voulut s'approcher, mais le seul bruit de ses pas mit fin à l'incroyable entretien : il n'était pas vu, mais on l'entendait.

Il avait tout capté sans perdre un mot, et avait même cru voir bouger tour à tour les lèvres de carton glacé sur chacun des trois portraits. Quel était ce prodige ? cela laissait rêveur... allait-il à terme, en se faisant discret, apprendre tous les secrets de la femme ?...

Le monde vertigineux d'un savoir neuf - et tellement précieux ! - s'ouvrait à lui.

Ce fut un tonitruant : "- A ce soir chéri, ne m'attends pas pour te coucher !" qui le tira de ses spéculations.

Comme tous les jeudis, Henriette rejoignait ses amies pour une soirée "Entre femmes" qui lui laissait, il faut le dire, l'opportunité d'aller "Refaire le monde devant quelques bières" avec ses propres amis au très chaleureux pub "Le Dublin" du centre ville.

  

4

Mais ce soir, bizarrement, ce n'était pas tout à fait la même Henriette qui s'éloignait en faisant tinter à la main les clés de son auto :

Visiblement jaillie du coiffeur avec une teinture blonde-platine inusitée celle-ci, pour la première fois, portait un superbe chapeau rouge à faveurs noires retombantes - qu'elle avait dû sans doute lui cacher. Sa tenue se complétait d'un tout nouveau bustier décolleté à provoquer l'émeute, d'un pantalon de cuir noir moulant fesse et jambe dans un galbe jamais vu de lui, et, alors qu'elle s'éloignait dans le nuage d'un parfum capiteux qu'Édouard ne reconnaissait pas, son visage, complètement transfiguré, était outrancièrement maquillé !...

 

 

JCP 09 2015 Pour Les Impromptus Littéraires (trois portraits de femme)

 

7 septembre 2015

718 Temps contraires

The_Awakening_Of_Apocalypse

 

Temps contraires

 

                                                     Un à un la rose reprend ses pétales fanés tombés à terre, se recoiffe, ravive ses couleurs et lentement se referme en bouton alors que le feuillage, qui décroît, rougit et se contracte en bourgeons minuscules.

Dans un tourbillon, le vent ramène les feuilles sèches qu'il a dispersées, les rend au peuplier satisfait qui les replace coquet, les ranime et les reverdit ; son tronc a minci, et le bois mort retrouve son écorce. Le feu qui ravageait la pinède quitte lentement la ramure, caresse les troncs et disparaît dans l'herbe noire qui verdit à vue d'œil.

Sous l'orage qui menace il n'y a plus un souffle de vent, alors que le jour et la nuit alternent à une vitesse folle. L'épais rideau de pluie aspire maintenant ses flaques, s'élève et disparaît avec elles ; les nuages courent en tous sens, et se heurtent dans le froissement des dessous de satin.

Le berceau se vide et se fond au gravillon du grand parc, alors que celle qui fut mère repart en sautillant, sa poupée retrouvée dans les bras. L'homme assis sur le banc au bois neuf est tombé : il n'y a plus de banc.

Dans la rue sombre, en un éclair le poignard quitte la plaie qui se referme, et disparaît ; l'homme se relève et ferme son blouson devenu trop grand ; sa calvitie fait place à son ancienne chevelure.

Et, si ce n'était le soleil assombri, où s'élargissent jour après jour de larges taches noires sous un grondement lointain, tout aurait pu continuer ainsi.

Peut-être.

 

 

JCP 07-09 2015

21 juillet 2015

La machine à rien-faire (nouvelle)

 

La machine à rien-faire

 ◄► 

le cékoidon comp

                

                                                  ◄►

 

                           C'est à l'Inquet*, grand fouille-tout de la ville que je la vis, à même le pavé, pitoyable et poussiéreuse. Oh, ce n'était rien qu'un vieil assemblage de laiton, de fonte et d'acier, présenté sur le socle lourd des instruments anciens, imaginés aux mains de savants très ignorants, doctes déducteurs de lois passées de mode, et dont on rit aujourd'hui.

A son comportement empressé, on eût dit que le vieil homme trouvait en moi le client longtemps attendu, le seul en accord parfait avec l'objet qu'il n'aurait voulu vendre à nul autre : mon prix fut le sien, et les recommandations interminables. Comme qui, déchiré, vous cède son enfant qu'il ne peut plus nourrir - et je crus voir une larme à sa paupière lorsqu'il me tendit la machine lourde, emballée dans plusieurs épaisseurs de papier journal :

- Prenez-en grand soin jeune homme, le meilleur du génie mécanique du dix-neuvième siècle - celui que nul n'a su voir ! -, réside en ce bel objet ; je ne vous en dis pas plus ; vous me remercierez plus tard...

Je pris congé courtois, le volumineux paquet sous le bras.

Éreinté par la course et le poids, rendu dans mon modeste meublé j'opérai un nettoyage-lustrage en règle de la mystérieuse acquisition où parut, gravé sur sa base :

 

Maquina de pas-res fa **

 

Je dus m'asseoir : "Machine à rien-faire" dans l'occitan toulousain d'alors !

Surprise et déconvenue passées, la chose vint à me plaire : elle était si belle sous le grain de sa peau noire et le poli de ses commandes... "à rien-faire"... : inutile comme l'art véritable, œuvre sans doute unique de quelque visionnaire, impressionniste des mécaniques, Picasso méconnu des automates !

Fasciné-médusé sourire large, je passai le reste de ma journée à rien-faire à la machine ; alors que d'ordinaire cela se fait aussi bien sans aide - tous les oisifs vous le diront. Paisible et silencieux je demeurai là, caressant, manipulant sans cesse ses leviers, ses gâchettes ses cadrans, tournant ses molettes, repoussant ses boutons dorés, buvant goulûment la musique de ses rouages, m'enivrant des senteurs de sa matière patinée, où ne paraissait que la marque infime d'un usage respectueux.

Ainsi nourri jusqu'au soir de l'inutile, c'est dévorant les pauvres restes d'un poulet froid que la lumière enfin m'apparut :

- Le vieil homme avait raison : l'esprit le plus fin, le plus subtil, le plus méconnu du dix-neuvième siècle, à contre-courant de l'avancée technologique, de l'industrie, de l'entreprise et du capital réunis était bien là, sous l'aspect de cet objet d'un art absolu tombé dans l'oubli : le concepteur de génie, trop longtemps prisonnier de l'utile, martyr de l'efficace et du rentable - message probable à la postérité -, en poète de l'hermétisme des formes avait imaginé cet appareillage, dans l'espoir qu'une élite future en saurait extraire la portée sublime.

Mon ego me dicta : "- Pour toi seul qui es élite et génie réunis !", mais je déclinai modeste.

 

De nos jours, autre époque autres machines, le rien-faire se pratique en général devant des écrans colorés.

 

 

 

* Prononcer Inquet avec le "in" anglais le é en vrai "é" et le "t" marqué, et non "ainquai" comme où vous savez.

("Hameçon" en français, marché aux puces toulousain qui parle de pêche aux affaires - comme d'arnaque et de pick-pockets).

** Le "A" de "maquina" se prononce "O" (intonation grave bouche ouverte) ;

"fa" se prononce fa.

Les "S" se prononcent.

 

 

JCP 07 15 Pour Les Impromptus Littéraires ; thème : le "Céquoidon" suivant image

(texte ajouté sur embase).

http://impromptuslitteraires.blogspot.fr/ 

7 juillet 2015

AIDONS LES NÉPALAIS

BLOG AF

 ACCÈS AU BLOG : CLIC / IMAGE CI-DESSUS

Aidons les Népalais

                                                     Oublié le cataclysme qui frappa le Népal, malgré l'aide qu'il nécessite toujours : tellement plus préoccupants pour les médias sont la météo, le lit des présidents ou le dernier nichon-chantant !

Ami d'enfance, Alain Fabre, résidant à St Juéry (Tarn), grand parcoureur des montagnes de ce pays, offre depuis trois ans déjà son aide bénévole à un orphelinat de Kathmandou.

Bouleversé par le séisme du mois d'avril - et par la perte de ceux qui étaient devenus ses amis -, celui-ci résolut d'ajuster son aide à l'ampleur du besoin, fondant l'association : "Solu Child Orphanage", tant venir en aide aux orphelins, certains estropiés, était urgent.

Ceci lui a permis l'achat d'un terrain et le démarrage des travaux pour un nouvel orphelinat à Kathmandou même.

Seuls 8.000 € font défaut aujourd'hui à l'association pour mener le projet à terme.

Si un peu de compassion vous anime, vous pouvez participer en déposant aussi votre don, ou en faisant connaître "Solu Child Orphanage" au plus grand nombre :

 

Virement au Crédit Agricole : Assos Solu Child Orphanage
IBAN: FR76 1120 6200 2490 0132 9389 372
Ou envoyer un chèque à : Solu Child Orphanage , 6 rue du Bac 
81160 Saint-Juéry

0563 451453, 0676 766685              


soluchild@orange.fr 

http://soluchild.wix.com/kathmandu

 

 https://www.facebook.com/pages/Solu-Schild-Orphanage/2418...

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Ci-dessous :

- L'appel lancé par Alain Fabre.

- Son compte-rendu

 

JCP

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Bonjour , Pour info

Le 25 avril, le Népal subit un terrible tremblement de terre. Très attaché à ce pays où je me suis rendu 5 fois pour effectuer des treks  en montagne et depuis 3 ans aider un orphelinat de Kathmmandu, je suis traumatisé par ce qui arrive à ce pays si pauvre avec ses habitants d'une si grande gentillesse

Nous rentrons avec mon épouse de Kathmandu

compte rendu de notre périple  à Kathmandu sur mon Blog:

 

http://tremblementdeterrenepal2015.blogs.nouvelobs.com/

 faites suivre 

merci

Alain Fabre, 6 rue du Bac, 81160 Saint-Juéry, 0563 451453, 0676 766685

Correspondant bénévole pour l'hebdomadaire le Tarn Libre.

Il y a ceux qui possédent sans travailler et ceux qui travaillent sans posséder (Ferdinad Buisson Prix Nobel de la Paix 1927)

Quand le sage montre la lune, le sot regarde le bout du doigt

Choisis le travail qui te plait et tu seras en vacances toute ta vie (Confucius)

 

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                                                       Le 25 avril, le Népal subit un terrible tremblement de terre. Très attaché à ce pays où je me suis rendu 5 fois pour effectuer des treks  en montagne et depuis 3 ans aider un orphelinat de Kathmmandu, je suis traumatisé par ce qui arrive à ce pays si pauvre avec ses habitants d'une si grande gentillesse. Après 3 jours d'appels infructueux, je réussi à joindre l'orphelinat. Kame Magar, son directeur me dit sa détresse. Pas de blessés mais des enfants traumatisés qui ne veulent et ne peuvent plus dormir dans cette maison qui a subit des dégâts suite au tremblement de terre; maison qu'ils vont devoir quitter car devenue dangereuse, mais aller où? A kathmandu, on ne trouve rien à louer. Je  constaterai sur place que la moitié des maisons ou immeubles sont à rénover ou à détruire avant reconstruction. Je dois aider l'orphelinat au travers de l'association que j'ai créé il y a 3 ans. Je lance un appel sur les réseaux sociaux, à plusieurs centaines de mes contacts et dans la presse locale. Je dis à mon épouse : "je rêve, mais si on a 5000€, je vais à kTM en payant moi même le billet d'avion". Il est bien sûr hors de question que l'argent récolté serve entre autre à payer l'avion ou quoi que ce soit. Quinze jours après, les résultats sont au delà de nos espérances 5000€;  mon épouse Yoyo me dit: "je viens avec toi". Elle a déjà partagé du temps avec les enfants à 2 reprises à KTM. Nous achetons les billets d'avion et le départ est fixé au 21 mai. Arrivés à KTM le 22 au matin, nous constatons que le tarmac de l'aéroport est encombré d'un grand nombre de containers de matériel et de nourriture pour l'humanitaire. Un nombre incalculable d'hélicoptères sont sur le tarmac et font des rotations ininterrompues. Quantité d'avions cargo sont présents et nous verrons durant nos 5 jours sur place un grand nombre d'avions cargo atterrir et décoller. Kamé nous attend à l'aéroport. Nous traversons la ville pour nous rendre à Jorpati, un quartier de KTM se trouvant à proximité de Bobnath. KTM vit à son rythme habituel, on ne dirait pas qu'il y a eu un tremblement de terre "hearquaque" en anglais, les népalais parlant en grande majorité anglais. Par moment des visions apocalyptiques, des immeubles par terre, d'autres qui sont tombés mais soutenus par celui d'à côté. Ce n'est plus du cinéma, ce n'est pas un film catastrophe et je peux vous dire que ça vous tord les tripes et vous donne envie de pleurer. C'est inimaginable, on se rendra compte plus tard que tout est à reconstruire. Nous arrivons à l'orphelinat et sommes accueillis en sauveurs. L'orphelinat n'est pas détruit mais fendu, il penche de quelques centimètres. Les enfants dorment sous la tente. La mousson arrive, le gouvernement népalais demande aux habitants de construire des maisons en bambou, comme au Japon, Laos, Thailande, etc.et veut construire un orphelinat en bambou, car il loue cet appartement sur 2 niveaux 220€ par mois. Nous devons aller voir un terrain l'après midi même.  Nous recevons le traditionnel Khata (foulard que kamé nous met autour du cou). Nous remettons aux enfants 20kg de vêtements que l'on nous a donné en France, ainsi que de nombreux stylos, trousses pour l'école et double décimètres offert par le Carrefour Market de Saint-Juéry. Au repas de midi où nous apprécions notre premier dal bath (riz avec une sauce au lentilles) kamé me dit : "Les enfants ont changé depuis votre arrivée, la joie illumine leurs yeux." Nous retrouvons Rozina 10 ans, elle est méconnaissable, si triste il y a 2 ans, elle rayonne de bonheur, il lui manque l'avant bras droit; il y aussi Passon, un petit garçon de 7 ans qui saute à mon cou et me fait de nombreux bisous.

Après le repas, nous allons voir le terrain qui se trouve à coté d'une école construite entièrement en Bambou, une vingtaine de classes, crépies à l'intérieur. Nous partons en ville et là c'est l'apocalypse: Ce n'était pas un film catastrophe, mais la réalité qui dépasse l'entendement et cette réalité fait mal. A la télé nous en voyons tant de catastrophes!!! Mais là nous sommes dans le réel, le temps présent et c'est beaucoup plus que ce que l'on peut imaginer. Des rues entière dévastées. Aucune sécurité, on peut approcher les ruines. Des maisons qui s'appuient sur d'autres, des gens à l'intérieur récupèrent ce qu'ils peuvent, des meubles, des briques et des matériaux pour reconstruire. 
KTM est devenue une ville de tentes, des milliers poussent en ville. Des immenses terrains en sont recouverts installées par les ONG du monde entier. Tout est très bien cadré, les stocks de nourritures sont gardés par l'armée; la distribution étant organisée par les ONG. Sur les trottoirs, dans les ronds points, des bâches tendues par 4 bambous font office de tente.
En fin d'après midi, nous avons rencontré karma Lama le Directeur de l'agence de voyages de KTM avec qui nous effectuons nos treks et Chantal son épouse. Nous avons dialogué prés de 2 h; ils nous ont raconté le terrible moment. La maison qui bouge, ils vont vite dans la rue mais il leur est très difficile de marcher car la terre est en perpétuel mouvement. Depuis la 2e secousse du 12 mai les népalais sont traumatisés.
Chantal nous a confié que chez elle, elle voit encore sa maison qui bouge. Ils dorment à la maison depuis le 20 mai, mais sont sur le qui vive. Ils attendaient ce tremblement de terre depuis 10 ans, les étrangers le savaient. Les népalais ne s'en préoccupaient pas. Karma a prêté toutes ses tentes qu'il a installé sur un terrain pour ses voisins. Avec Chantal, ils aident un petit village à construire des abris avant la mousson. Les népalais, ce peuple si chaleureux est en train de vivre un grand moment de solidarité.

Les treks étant annulés, seule ressource pour Kamé avec très peu d'aide du gouvernement, il se demandait comment il allait pouvoir continuer:

Nous avions 7000€ de disponible, nous leur avons acheté:

Beaucoup de vaisselle, il leur manquait de tout: Verres, tasses, bols, assiettes, casseroles, plats, mixer, bouilloire, thermos, 40m2 de tapis qui fait fonction de matelas, etc. Des jouets pour les enfants, ils n'ont rien, Othelo, le monopoly, des voitures, des perles pour les filles, des légos etc. Pour 6 mois de nourriture avec entre autre: 25 sacs de riz de 30kg, 4 sacs de lentilles de 30kg, 5 sacs de sucre de 40 kg, 240 litres d'huile, 5 bouteilles de gaz, 300kg de pomme de terre, etc. La nourriture pour 1900€ environ. Cela représente 315 € par mois pour nourrir plus de 25 personnes, soit 10€ par jour pour 25 à 30 personnes. Pour l'école: nous avons acheté 175 pièces pour 975€ : Pantalons, chemises, robes, vestes, chaussures, cravates, ceintures et pour 700€ de livres et cahiers.

Samedi 22h40, tout le monde est couché. Je regarde un film sur ma tablette numérique, je n'ai rien entendu mais j'ai senti de fortes vibrations. Les enfants pour la 1er nuit depuis le tremblement de terre dormaient tous dans la maison entassés au Rdc, car il y avait eu un fort orage l'après midi. En 2 secondes, tout le monde était debout et sortait précipitamment. La secousse était faible, mais assez forte pour (panique à bord). Avec ce qu'ils ont subi on peut comprendre. Tout le voisinage est sorti simultanément. Nous sommes restés une vingtaine de minutes à l'extérieur avant de rentrer, les enfants retrouvant leurs tentes. Nous avons dormi tout habillés en prévision de nouvelles secousses, il n'en fut rien. Dimanche matin, 5h30 tout est calme, il fait beau.

Vers 8h un journaliste de la télévision népalaise vient m'interviewer ainsi qu'à mon épouse.

Ne pouvant pas rester dans le bâtiment actuel qui doit être réhabilité, quand? Impossible de trouver une location sur le secteur. La solution est d'acheter un terrain que Kamé après maintes recherches a trouvé. Lundi matin, 3h de discussions avec le propriétaire du terrain. Incroyable ! le terrain coûte 5 fois plus cher que le bâtiment. 16 000€ le terrain, 3 000€ le bâtiment.

Le terrain fait 4 Anna, un Anna = 31 m2, il faut 3 Anna minimum pour construire. J'ai téléphoné à 2 connaissances à KTM qui m'ont confirmé que les prix des terrains sont devenus fous depuis quelques années. 125m2 en ville 16 000€!!! quand un ouvrier gagne 70€ par mois!!! J'ai dis au vendeur que nous n'avions pas cette somme et qu'il nous était dans l'impossibilité de payer et nous n'avons que 4000 € . Il me répond qu'avec 4000 euros, il pouvait faire les travaux. Pour la suite ce n'était pas urgent. Après 3 heures de dialogue, j'ai négocié le prix à 15 000 euros tout compris avec le bâtiment; en lui spécifiant qu'il n'avait pas de promesse d'être payé. Il est ok, car pas facile de vendre des terrains à ce prix. On peut comprendre tous ces terrains en friche en ville.
90 personnes ont déjà donné et nous les remercions infiniment; il n'y a pas de petit don, nous en avons eu de 5 à 1000 euros par un lycée de Millau, Lycée qui  est en relation avec l'orphelinat au travers de l'association. Mardi matin nous devons aller payer une tente et en louer 4 autres; le temps passe. A midi, Kamé arrive tout heureux et nous annonce: "On a 2 tentes": Incroyable!!! Pascal et Oriana de SOS Attitude Grenoble accompagnés de Bayrik un népalais viennent d'installer 2 tentes de 12 places à côté de l'orphelinat. Nous n'aurons pas à en acheter. C'est une chance inouïe, les ONG font un formidable travail.

Nous ne savons pas la chance que nous avons de vivre dans les pays du nord à côté des pays du sud qui vivent dans la misère. Comme dit mon ami français Henri Sigayret qui vit depuis plus de 25 ans au Népal (vainqueur de l'Annapurna en 1978) et marié à une népalaise: "La misère au Népal n'a rien à voir avec la misère en occident; les nécessiteux en occident sont riches par rapport au Népal, ils sont aidés, nourris et soignés".

Nous venons de vivre 5 jours exceptionnels, nous avons vécu avec eux, mangé avec eux, dormi avec eux à même le sol sur un matelas de quelques centimètres, dur comme le ciment. Je sais qu'en allant faire les achats de vaisselle, ils se sont fait plaisir. Ils n'avaient rien, on leur a permis d'acheter ce dont ils avaient besoin, ce dont il rêvaient et qu'ils ne pouvaient se payer. Nous étions heureux pour eux, nous avons triplé leur vaisselle et matériel de cuisine. Ils manquaient de tout, ils n'avaient pas de verres etc. Pour la nourriture ils se sont fait plaisir aussi. Mais que c'est bon de pouvoir donner, de pouvoir faire du bien. Il fallait voir la joie des enfants petits et grands, que du bonheur!!!

Il nous manque prés de 12 000 euros pour que l'orphelinat continue à exister. Sans cette somme, l'orphelinat ne pourra survivre faute de local et ce serait dramatique. Je lance cet appel à  la France entière, si 200 personnes envoient 60€ à  l'association, elles auront une déduction fiscale de 39.6 euros et donneront en réalité 20.4 euros et notre pari sera gagné.

Merci pour les enfants.

Alain Fabre, Président de Solu Child Orphanage.

²Virement au Crédit Agricole: Assos Solu Child Orphanage
IBAN: FR76 1120 6200 2490 0132 9389 372
Ou envoyer un chèque à : Solu Child Orphanage , 6 rue du Bac 
81160 Saint-Juéry: 0563 451453, 0676 766685
soluchild@orange.frhttp://soluchild.wix.com/kathmandu

 

 https://www.facebook.com/pages/Solu-Schild-Orphanage/2418...

 

 

Alain Fabre, 6 rue du Bac, 81160 Saint-Juéry,

05 63 45 14 53, 06 76 76 66 85

Correspondant bénévole pour l'hebdomadaire le Tarn Libre

 

       

JCP 07 15 

1 juillet 2015

704 Plume aux vents

 

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Plume aux vents

 

                                                       Il était une plume à la main rageuse d'un poseur de mots sans talent qui, se croyant écrivain, écrivait, mais n'écrivait que des écrits vains que nul autre que lui ne lisait.

Inlassable malgré son pauvre trait, celui-ci griffonnait des mots enfiévrés qu'il biffait aussitôt ; et la plume au supplice se rappelait l'aile des oies, le vertige des airs et le souffle des vents qu'elle connut autrefois.

Et sous la triste poussière du bureau sans luxe, la souillure du flot noir et l'incessante flexion de sa pointe sous le doigt brutal, la malheureuse diluait de ses pleurs une encre toujours plus claire - que le traceur impénitent renouvelait surpris.

Un jour par la fenêtre ouverte, saisi de pitié, un vent de sud qui passait l'emmena compatissant vers les contrées bénies où, dit-on, les mots ne s'écrivent pas ; et la plume, enfin apaisée, connut le bonheur à jamais.

Aussi vous qui voyez, baignant à l'encre immonde ou sur le trottoir des villes abandonnée une plume pleurer, d'une main généreuse et délicate, déposez-la sur l'aile du vent.

 

JCP 06 15  Pour les Impromptus Littéraires :

http://impromptuslitteraires.blogspot.fr/2015/07/jcp-ecrire.html

 

27 juin 2015

Les Quatre Saisons

 

Les Quatre Saisons*

* Météorologues, musiciens et cinéastes ont usurpé ce titre.

 

  

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- Saison 1 : Lassitude terrestre

 

Où l'on voit comment la terre lasse

Supprime la vie de sa surface.

 

Harassée d'outrages incessants

Et de voir couler partout le sang,

La terre ruminait en silence

Le projet d'une lourde vengeance.

 

Car de l'homme et de ses tristes dieux

Qui n'ont jamais su le rendre heureux,

J'en ai disait-elle plus qu'assez,

Et de ce pas je vais tout raser.

 

Alors, sous le soleil qui l'accable

Elle boit d'une soif implacable

Les fleuves qui ne couleront plus ;

Et des mers où l'on ne vogue plus

On ne voit que montagnes de sel,

Partout peuplées de noirs archipels.

La terre ainsi lentement s'apaise,

Allonge un peu ses nuits, prend ses aises ;

 

Et, libérée du monde vivant,

Elle fait feu de tous ses volcans,

Heureuse sous sa chemise grise

Que refroidit une douce brise.

 

Et la terre alors pour cent-mille ans

S'assoupit du sommeil des titans.

 

Verrons-nous le réveil de la terre ?

Entrerons-nous dans la nouvelle ère ?

Vous le saurez assurément

En lisant le chapitre suivant.

 

 

 

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- Saison 2 : Les Feux de Dieu

 

Résumé de la saison 1 :

La mort régnait partout sous la poussière grise,

Et la terre dormait sous la petite brise.

 

Or, le Créateur en ce temps-là

Séjournait sur Mars pour ses lombaires,

Où, dit-on, les eaux sont salutaires

Aux antiques dos de l'Au-delà.

 

Et les soirées aux Thermes célestes

Le voyaient porter un œil zélé

Aux Feux de l'amour à la télé -

Vibrant même aux scènes les plus lestes.

 

Écran noir mais parabole intacte,

Scrutant alors la planète bleue,

Il vit hélas de ses propres yeux

Qu'il ne saurait rien du dernier acte !

 

Et le rouge au front la rage aux mains,

Dieu pétrit notre planète terre

A la façon des gros camemberts,

En attendant d'autres lendemains...

 

Que deviendra la terre, creuset d'autant de haine ?...

Vous l'apprendrez c'est sûr dès la saison prochaine.

 

 

 

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- Saison 3 : Aux planètes le plat ne va pas

 

Résumé de la saison 2 :

La Divine Colère

Aplanissant la terre,

Il est de francs soucis

Pour sa simple survie.

 

Et c'est ainsi qu'on vit le train des nuées vastes

Pleurer sur ces contrées que le courroux dévaste.

Mais hélas non tenues, les eaux par les côtés

Retournaient au néant, plate fatalité.

 

Sous la fraîcheur du flot la terre enfin s'éveille.

Elle avait bien senti à l'entour de ses pôles

Une vague pression, mais planète sommeille

Mieux que cent nourrissons que rien ne déboussole.

 

La terre alors se mire, pleure sur sa minceur,

Lève le poing aux Cieux, maudit le Créateur,

Ranime ses foyers, échauffe sa matière

Et reprend ses rondeurs aux couleurs de naguère.

 

Trois pattes pas de bras, on vit alors paraître

Une espèce nouvelle, privée d'intelligence,

Inoffensive et bête, se contentant de paître.

Et la terre chérissait la pacifique engeance.

 

Mais aux Cieux lamenté, un Dieu sans feuilleton

Ruminait en silence une autre Création...

 

Que fit le Dieu fripon ?

Il faut lire pour ça -

Vous en serez baba -,

La quatrième saison !

 

 

 

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- Saison 4 : Les dessous de la Création

 

Résumé des saisons précédentes :

Alors que Dieu prenait les eaux,

La terre partait à vau-l'eau.

 

A ce point précis, nous nous reporterons aux Saints Ouvrages, qui relatent pour le mieux la Création Première, taisant comme on le voit qu'elle fut la Seconde.

Mais sa télé bientôt retrouvée, Dieu nous dit-on fut satisfait.

 

 

JCP 06 2015

 

15 juin 2015

689 Incertitudes aériennes

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Image : JCP réalisée sans truquage

 

Incertitudes aériennes

(et baudelairiennes)

 

Souvent, pour s'amuser, les hommes d'équipage

Délaissent à loisir pour un temps le voyage,

Et chassent en buvant leurs peines leurs tourments,

Les commandes de vol oubliées un moment.

 

Alors dans la cabine on déploie les lampions,

On danse on chante on rit, on laisse aller l'avion,

Libre de ses ébats aux traces incertaines :

Qu'importe le trajet, Dunkerque ou mer Caspienne...

 

Vous qui ne doutez pas du sérieux des pilotes,

Tous passagers heureux parvenus à bon port

Au terme d'un parcours que vous croyez sans faute,

Sachez qu'à votre insu on rit de votre sort.

 

 

JCP 05 2015 (premier vers emprunté bien sûr à "l'albatros" - de qui vous savez)

20 mai 2015

Fin de nuit sous la pluie

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                                    Toulouse, rue du May (im. JCP)

 

 

Fin de nuit sous la pluie

 

◄ ►

 

 

1

 

                                                         Au terme de trois accidents de réverbère - mal disposés sur un trottoir onduleux -, je finis par trouver la rue.

Ma rue.

Et la porte vitrée du petit commun.

Celui où j'habite.

Pourtant de cuir noir, le toucher lisse et l'odeur familière, mon blouson ne contenait dans ses poches ni mes clés ni mon portefeuille, mais un mouchoir sale, un peu de monnaie, une boîte de cachous et quelques papiers. Je découvris alors qu'il pleuvait et que, manches trop longues et fermeture bloquant à mi-course, ce blouson était celui d'un autre.

Collé au mur, cheveux mouillés comme à la douche et visage ruisselant, la soirée tequila au Macambo tournait au vinaigre : au terme de ces chaudes retrouvailles, le désordre de fin de soirée avait glissé jusqu'au porte-manteau, au moins pour deux des anciens élèves de l'INSA - dont moi-même.

Misant sur l'honnêteté sans faille des gens de science, restait le manque d'abri à quatre heures du matin sous la pluie - et la perspective d'un immédiat plus qu'ennuyeux : voiture inutile sans clé, impossibilité de réveiller l'immeuble tout entier où je ne connais encore personne - d'ailleurs, qui descendrait m'ouvrir en pleine nuit à Toulouse ?

Bistrots métro fermés, gare lointaine, dessous du pont Neuf bourré de SDF cuvant leur pinard verbe haut et geste imprévisible, je fus heureux d'un abribus tout en haut de l'avenue Jean-Jaurès, et me blottis tremblant contre la vitre glaciale, fesses mouillées sur le banc de tôle perforée - inoxydable à point nommé.

- Brrr !...

La pluie ne cessait pas et, sortant progressivement de son anesthésie éthylique, mon mental charriait des nuages noirs.

 

 

2

Soudain une voix de femme, forte et assurée :

- Y aura plus de bus à cette heure tu sais ; mais t'es tout mouillé... viens chez moi, je te réchaufferai...

Une professionnelle des situations désespérées se tenait campée devant moi, sous son parapluie, la cuisse affirmative résillée de noir.

- Je voudrais que j'ai pas un rond - et puis c'est pas le sujet ! répondis-je avec animosité : j'ai paumé mes clés et j'attends le jour pour rentrer chez moi - encore qu'il me faudra un serrurier...

Toute disposée à m'entendre (ces femmes là sont compatissantes), je lui fis connaître mes déboires, ce qui l'anima beaucoup (ces femmes-là sont férues de fête et de fêtards).

- Bon, bon, t'as l'air sincère et je te vois bien triste mon Loulou, y sera pas dit que Clara elle a pas bon cœur, allez, viens quand même te mettre au chaud, je rentrais moi aussi tu vois, je crèche tout à côté, viens, il est tard... fit-elle d'une voix soudainement adoucie.

- Mmm...

- T'as pas confiance bien sûr...

- Si...

- Ah mais j'ai pigé, t'as la trouille que mon mac se pointe ; rassure-toi : il est à l'hostau pour un bon moment - règlement de comptes ; y croyait faire dans le gros trafic, il a pas les épaules le pauvre Chou, enfin...

- Euh, t'en parles comme si tu l'aimais, je sais que vous êtes bizarres, les femmes, mais...

- Hé, c'est mon mac mais c'est mon mec, il est super avec moi, je suis sa reine qu'il dit toujours, sûr que je l'aime beaucoup... Bon, tu viens ou tu prends racine ?

- Ouais, c'est d'accord. T'es sympa ; en plus t'étais pas obligée ; je te suis.

- Sympa pour une pute ?

- Non, non, j'ai pas dit ça, au contraire, y a plein de filles qui feraient pas ça, t'es chouette.

 

 

3

Vaste et luxueux mais sans tapage, l'appartement était très classe (même pour une pute).

- Belle piaule, fis-je admiratif.

- Mon Robert m'en laisse assez, ça va pour moi. Quitte ces fringues et mets-toi à l'aise. Tu peux te désaper devant moi, je te sauterai pas dessus ; décontracte-toi, allez, t'es bien ; là... donne aussi ton slip, on va sécher tout ça.

J'eus le sentiment de me déshabiller - asexué - en consultation chez quelque toubib des chagrins, et le fait est que je sentais monter à ma lèvre un sourire sans cause apparente.

Bain à bulles dans la baignoire monumentale, peignoir de soie, canapé plus confortable qu'un lit, petit déjeuner royal en tête à tête avec cette jeune femme dont l'étrange beauté gommait la face connue, amabilité souriante... Je pris congé tout confondu vers neuf heures, incapable de retenir un "naturel" :

- Je peux repasser te voir à l'occasion ?

- Mais bien sûr mon Chou, viens boire le café quand tu veux ; tiens, appelle-moi d'abord à ce numéro là :

Elle glissa une carte dans la poche de mon blouson trop grand, puis m'embrassa bruyamment sur les deux joues comme le ferait une vieille amie, et je me retirai, vêtements séchés par des soins de mère, complètement déboussolé.

Il ne pleuvait plus et les réverbères, en ordre parfait sur le trottoir rectiligne, resplendissaient sous un soleil déjà haut.

 

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JCP  05 15 Pour Les Impromptus Littéraires, sujet proposé : "Quatre heures du mat', sans clés, sans bagnole, sans toit, il pleut" :

http://impromptuslitteraires.blogspot.fr/2015/05/jcp-4h-du-mat.html

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