L'agonie du Temps (0994)
L’agonie du temps
Navigateur jamais lassé
qui se riait des tempêtes toutes voiles crevées,
le Temps, qui ralentit sa course,
est venu s’abriter au pied de la falaise.
Tremblant comme un oiseau blessé,
lui qui se crut immortel connaît la peur du trépas :
- s’il allait voir sa fin sur cette grève où la mer se retire ?
Des malaimés il connaît tout suffrage,
et les peuples courroucés qui l’ont chassé là
n’auront de répit qu’il ne s’éteigne.
De tous traits reçus, son flanc voit s’écouler
le flot d’une durée qui lentement s’étiole,
et connaît sa fin.
Alors, dans le tremblement des airs,
le Temps perd sa substance ultime
et meurt sans pousser un cri.
De grands oiseaux blancs infléchissent leur course
et saluent le défunt dont ne reste,
sur les galets humides,
qu’un amas confus de chiffres et d’aiguilles
que, déjà, la marée emmène.
JCP 04/2019 – 02/2020